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136 L'ORIENT D'EUROPE AU FUSAIN. Après avoir traversé des bois pittoresques arrosés de cours d'eaux, nous nous engageons dans la partie aride de la montagne. De grandes carrières de marbre aban- données, noircies par le temps, se dressent de toutes parts; le sentier, à peine indiqué, court parmi les frag- ments éblouissants de blancheur, noyés dans des détritus micacés qui scintillent comme le diamant. L'ascension est pénible et dure deux heures. Notre pa- triarche, pater Baconia — c'est son nom — marche en avant sans s'arrêter et court comme un vieux cheval de fiacre. Avec notre prêtre en tète du cortège, nos soldats par derrière, nous avons assez l'air de monter à l'échafaud. A moitié chemin nous trouvons une vaste grotte dont une partie est transformée en chapelle peinte. Nos soldats vont dévotement baiser chaque image et multiplient avec rapidité les signes de croix; ils mettent dans ce geste réitéré une action tellement fébrile qu'elle ferait croire à une maladie nerveuse. Nous décidons le caporal à laisser là trois de ses hommes, comme en un poste d'observation éminemment stratégique. Notre corps d'armée ainsi divisé, nous repre- nons notre chemin à travers les blocs roulants. A mesure que nous montons l'horizon s'étend, l'Attique se resserre, les chaînes de montagnes se dessinent, les côtes s'accentuent et le panorama, d'une teinte fade, oc- casionnée par la position du soleil et par une vapeur mate qui couvre le paysage, le panorama, dis-je, malgré son absence de couleur, devient singulièrement imposant. Près du sommet, je trouve les restes d'un4ombeau de l'âge de pierre entouré d'une enceinte ronde formée de pierres brutes et plates posées sur champ ; il est orienté au midi. Avis aux archéologues. Ce tombeau est incontes- tablement de la plus haute antiquité... à moins qu'il n'ait