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376 LE PAGE DU BARON DES ADRETS. faites. J'avais versé mon sang dans la Lombardio, et mon épée avait anéanti les ennemis de mon pays. Il y avait plaisir à égorger ces traîtres ; mais je n'aime pas à tremper mon épée dans le sang de mes frères. Eh ! après tout, qu'importe; les Guises seuls en sont respon- sables. Mais ce qui me trouble c'est que je suis obligé de m'élever sur tant de ruines, et Satan se met de la partie. Le baron se pencha de nouveau sur la tour, comme pour prendre à témoin les dévastations de la belle cité lyonnaise. — Mais je faiblis, se dit-il, en foudroyant la ville de son regard, non, ma vengeance n'est pas assou- vie ; il faut que mes ennemis sentent toute la puissance de ma colère, que les ruines s'amoncellent sur les ruines jusqu'à ce que la cour de France crie merci. Marchons, allons vers mes compagaons, ma vengeance ne fait que commencer. — Et il allait descendre quand le jeune page se jeta au devant de lui, —Monseigneur! Monseigneur! Grâce! assez, assez de sang! Dieu vous en demanderait compte un jour. Le baron des Adrets surpris resta immobile : — Quoi ! mon enfant, tu étais là m'écoutant? Ah! tout autre que toi eût payé cette témérité de sa vie. Viens, mon enfant, il fait froid ici, tu trembles. — — Ne partons pas encore, dit le page s'attachant au baron, vous ne partirez pas que vous ne m'ayez écouté. Oh! j'ai lu dans votre âme, Monseigneur, comme les gens de la campagne lisent dans le ciel le temps du lendemain, et j'ai vu que vous aviez du remords du mal que vos soldats commettent. Pourquoi tant de