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112 CINQ-MARS ET DE THOU. ret des deux mains. En recevant le coup, il (Cinq-Mars) poussa une voix forte, comme Ah! qui fut étouffée dans son sang ; il leva les genoux de dessus le bloc, comme pour se lever, et retomba en la mesme assiette qu'il es- toit. La teste n'estant pas entièrement séparée du corps par ce coup, l'exécuteur passa à sa droite, par derrière, et, prenant la teste par les cheveux, de la main droite, de la main gauche, il scia avec le couperet une partie de la trachée artère et la peau du col,qnin'estoit pas cou- pée. Après quoy, il jeta la teste sur l'échafaud, qui de là bondit à terre où l'on remarqua qu'elle fit encore un demy tour et palpita assez longtemps.Elle avoit le visage tourné vers les religieuses de Saint-Pierre, et le dessus de la teste vers l'échafaud, les yeux ouverts. « Son corps demeura droit conîre le poteau, qu'il te- poit toujours embrassé, tant que l'exécuteur le lira de là pour le despouiller. Ce qu'il fit, et puis il le couvrit d'un,drap et mit son manteau par dessus. La teste ayant esté rendue sur l'échafaud, elle fut mise auprès du corps, sous le mesme drap. « C'est une merveille incroyable qu'il ne témoigna jamais aucune peur, ny (rouble ny aucune esmotion, ains parut toujours gay, assuré, inébranlable, et tes- moigna toujours une si grande fermeté d'esprit, que tous ceux qui le virent en sont encore dans l'étonne- ment. « M. de Cinq-Mars estant mort, on leva la portière du carrosse, d'où M. de Thou sortit d'un visage riant; lequel ayant salué fort civilement ceux qui estoient là auprès, monta assez vite et généreusement sur l'écha- faud, tenant son manteau plié sur le bras droit ; où