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            TRAITRE OU HÉROS?


                      L'ILE DE SAROAIGNE.

                                   (SUITE).




   L'intrépide explorateur ne devait pas échapper, cependant,
à celte puissance inconnue qui agit sur l'âme dans le silence
menaçant et la mystérieuse demi-nuit des forêts ; demi-nuit
plus effrayante qu'une obscurité complète, et dont les poètes
de l'antiquité ont si admirablement exprimé l'effet en l'appe-
lant la sainte horreur des bois.
   À peine eut-il pénétré plus avant dans l'âpre région où il
s'était engagé, que la vallée se resserrant sans cesse, et les
arbres de plus en plus pressés ne laissant pénétrer sous
les fraîches voûtes de leurs branches entrelacées, qu'un jour
douteux et funèbre, le pèlerin eût pu se croire dans la
forêt ténébreuse et sauvage, dont le seul souvenir remplissait
de trouble et d'épouvante le sombre chantre de la cité des
pleurs ;
                 . . . . Selva oscura,
                 . . . .Selva sclvaggia e aspra è forte
                 Che nel pensier rinuova la paura ;
                 Tant' è amara, che poco è più morte (1) !


   (1) Dante, Enfer, ch. 1. — Il n'est pas de voyageur ayant !u le
Dante, et parcourant les montagnes de la Sardaignc, à qui leurs sauvages
vallées ne rappellent plus d'une fois la célèbre description qui ouvre d'une
manière si saisissante le premier chant de la Divine Comédie.