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VOYAGES. 39 porté dans un jardin féerique. Les troncs d'arbres sont ha- billés, non de leurs propres feuilles, mais de parasites sans nombre, d'où s'échappent des fleurs aux teintes vives et tran- chées qui,—• toujours suivant Biard, — donnent l'envie dé- mesurée de se coucher sur elles, d'y être balancé au souffle du vent, comme on l'est dans un hamac, en ce que les moindres arbustes sont grossis oulre-mesure par les lianes qui les couvrent d'une seconde écorce et au bout desquels, alors même qu'ils sont brisés ou desséchés, on voit les fleurs s'épanouir et vivre on ne sait comment, si te n'est de l'air, attendu qu'elles n'ont autour d'elles aucun élément de végé- tation. Les orchidées dont parle Biard, retombent en grappes roses ou saffranées du tronc des bambous et d'une hauteur consi- dérable. Elles sont fasciculées, en épis ou enpendicules, ainsi que l'indiquent les études du peintre exécutées sur place, et qui sont aussi, curieuses que considérables dans leur déve- loppement, malgré les altérations que leur ont fait subir les fourmis-termites pendant son sommeil sous la tente. L'admiration causée par des spectacles aussi grandioses , admiration à laquelle les âmes cèdent toujours, quelles qu'elles soient, reste soumise, au surplus, à des mécomptes que notre voyageur a éprouvés lui-même , car, pendant qu'escorté de deux Indiens, il suivait les étroits sentiers tra- cés par les tapirs au milieu des forêts vierges d'Espirilo- Santo, un serpent monstrueux, le souroucoucou, apparut soudain au conducteur qui le précédait, lequel ayant tiré sur lui presqu'5 bout portant, l'abbatlit à ses pieds. Ce trigonocéphale, que Biari dépouilla de sa peau no- nobstant l'effroi et la résistance de ses guides, n'a pas moins de quatre mètres de longueur. 11 existe maintenant empaillé dans son atelier des Plâlreries, où je l'ai vu mêlé aux mille et une choses remarquables recueillies dans ses lointains voyages.