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                           TRAITRE OU HÉROS,                            23b

cédée d'une espèce d'agape où les convives ne se partagent
que des végétaux (1).
   Les fériés universitaires en Sardaigne ayant lieu pendant
les mois de mai et de juin, avaient ramené Antonio au sein
de sa famille. Il prit une part empressée aux fêtes populaires
de la Saint-Jean, et l'on vit l'héritier des Montalva et la
charmante enfant des Malipierri se choisir réciproquement
pour compère et pour commère.
   Le public voulut reconnaître dans ce double choix un
échange d'engagements que l'on ne tenait plus à cacher.
   Cependant, aucune démarche sérieuse et autorisée de la
famille du jeune homme n'avait eu lieu de la part de ce
dernier, lorsqu'il dut aller reprendre à Sassari le cours de
ses études.
   Seulement, au moment de son départ, il avait fait parvenir
à Thérésina un bouquet de roses (La Sardaigne est par ex-
cellence la contrée des roses) et dans le cœur de l'une d'elles
se trouvait délicatement caché un petit billet contenant ces
vers que je traduis ici mot à mot comme un échantillon de
la poésie galante du pays :
   « Un de les cheveux, ô ma belle, et un encore pour que
ton esclave s'en couse les yeux,
   Et qu'ils ne puissent s'ouvrir, ces yeux, sur aucune autre
femme,

   (1) « Nous ferons observer que YErme ou Nenneri de la Sardaigne rap-
pelle d'une manière frappante les fameux jardins d'Adonis, fête également
solsticiale, où l'on portait du blé semé dans un vase qu'on jetait ensuite à
la fin de la fête. Les Athéniens avaient également un vase où ils avaient
semé du blé lorsqu'ils célébraient la fête d'Hermès ^Elhonxus ; la cérémonie
de passer trois fois la main sur les flammes, est également un usage bien
antique ; en un mot, celui dont nous avons parlé ci-dessus paraît se ratta-
cher au culte de l'Adonis phénicien et à celui de l'Hermès hellénique. »
                     LA MARMORA, Voyage en Sardaigne, t. 1, p. 265.