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236 TRAITRE OU HÉROS. Jusqu'à ce que le pauvre aveugle revienne à tes pieds te . demander de les délivrer loi-méme de cet amoureux lien, et de leur rendre la douce lumière des deux dans les liens ! » Thérésina envoya les cheveux ; ils étaient noués autour d'un petit bouquet de myosotis. Antonio répondit à cet envoi par celui d'une branche d'o- ranger chargée de fleurs. La fleur d'oranger tonnant la couronne habituelle des fiancées conduites à l'autel, le présent d'Antonio avait un langage muet que le cœur de Thérésina entendit sans inter- prèle. Antonio quitta Cabras pour Sassari emportant avec lui l'âme de la jeune fille. Pour celle-ci, Cabras ne fut plus qu'un désert où rien de ce qu'elle avait aimé ne conserva d'attraits pour elle, que ce qui se rattacliait dans sa pensée à l'unique objet qui les remplissait toutes, et qui était devenu comme la lumière de sa vie. L'année s'écoula. Antonio venait d'obtenir le grade de licencié, quand on appril tout a coup à Cabras que, par les soins de son oncle, il épousait la fille unique d'un magistrat de premier ordre, possesseur d'une fortune consi- dérable, et dont la position élevée assurait l'avenir du jeune homme en lui assurant l'appui d'une protection puissante dans la carrière à laquelle il se destinait. Thérésina n'était pas une de ces pâles et délicates fleurs du nord que Lord Byron jugeait si peu faites pour rivaliser avec les fières beautés du midi dans le ssin desquelles brûle l'ardente flamme où s'allument tour à iour et souvent à la fois les passions les plus contraires, les dévoûmenls généreux, les colères implacables, l'amour plus fort que la mort, la vengeance plus forte que l'amour. Le chanlre d'Harold eût pu trouver en elle les héroïques trails de sa vierge de Sarra- gosse, mais elle n'eût point inspiré à Goethe la douce et