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                       DE L'HISTOIRE ROMAINE.               -199

 vérité', aurait, en outre, l'avantage de donner des résultats
 toujours en nombres ronds. Nous choisirons dans l'histoire
romaine les principaux faits où les chiffres forment la partie
 la plus saillante de la narration et peuvent nous fournir
 d'utiles rapprochements avec ce qui se passe aujourd'hui
 sous nos yeux.
    A l'une des plus belles époques de la république, lorsque
Scipion, le premier Africain, après avoir vaincu Carthage, se
fit lieutenant de son frère pour lui procurer les honneurs du
commandement en chef dans la guerre contre Antiochus, on
voulut, lorsqu'elle fut terminée, qu'il rendît compte devant le
Sénat d'une somme de Quatre millions de sesterces (5) [soit
800 mille francs) qu'il avait reçue en sa qualité de lieute-
nant. Scipion, en produisant son registre de recette et de
dépense qu'il tenait à la main et qui aurait pu fermer la bou-
che a ses" ennemis, le déchira, indigné qu'on exigeât de lui
des pièces à l'appui de sa gestion. « Sénateurs, s'écria -t—il,
« je ne rendrai point compte a votre trésor, comme lieute-
« nant de mon frère, d'une misérable somme de quatre
« millions de sesterces, moi qui, commandant en chef et
« sous mes propres auspices, ai versé dans les caisses de
« l'Etat Bis millies, 200 millions de sesterces (40 millions
« de francs), je ne pense pas que la malveillance puisse aller
« jusqu'à mettre en doute ma loyauté. Après avoir soumis à
« votre pouvoir l'Afrique entière, je n'en ai rien rapporté
« que je puisse dire mien, si ce n'est le surnom que je porte.
« Les trésors de Carthage ne m'ont pas plus corrompu que
« ceux d'Asie n'ont corrompu mon frère. Nous n'avons re-
« cueilli l'un et l'autre que l'envie. » Le Sénat tout entier
applaudit a une défense si pleine de dignité.
   Bientôt après la chute de Carthage, les richesses du monde

 (5) Valer. Maxim. Lib. III, cap. 7.