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                  CLÉMENCE ISATJRE

         ET LES JEUX FLORAUX EN 1857.



                                            Toulouse, 3 mai.

         MON CHEK DIRECTEUR ,

   Je vous écris sous l'impression d'un de ces spectacles que la
foule semble dédaigner, au milieu des préoccupations indus-
trielles et mercantiles d'un siècle qui multiplie les entraves, afin
d'arrêter l'essor des intelligences, pour les ramener sans cesse
au terre-à-terre de la vie matérielle. Toulouse était aujourd'hui
en pleine fête des fleurs, fleurs d'or et d'argent, de velours et de
soie, et par dessus tout, fleurs que Dieu seul peut former avec
leurs inimitables couleurs et leurs parfums délicieux. Il semblait
que tout ce que les champs et les jardins produisent de plus ra-
vissant se fût donné rendez-vous pour émailler les rues de la
cité toulousaine, et il n'aurait pas fallu un grand effort d'imagi-
nation pour se croire transporté dans le palais des fleurs ani-
mées.
    Le 3 mai est, comme vous savez, l'époque fixée pour la séance,
solennelle des concours académiques des jeux floraux, arène pa-
cifique où les fleurs traditionnelles de Clémence Isaure étaient
une récompense autrefois plus enviée que tous les prix de l'Aca-
démie royale, nationale et impériale. Quel poète n'a pas rêvé,
dans sa vie, de l'églantine ou de la violette d'or? Quel serviteur
des muses n'a pas ambitionné le titre de maître es jeux floraux?
    L'institution du Gai Savoir, comme on l'appelait jadis, tenait
dans le monde des lettres un rang privilégié, et il ne faut pas
 s'étonner de l'influence civilisatrice et morale qu'elle a exercée