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290 DE h\ PHILOSOPHIE DE L'HISTOIRE. drez-vous toujours des barbares pour recommencer les courses des Pélasges en Grèce, les essaims de bandits à la fondation de Rome, les irruptions de notre cinquième siècle? Grâce à Dieu, la barbarie s'épuise, comme ces loups dont le sol de l'Angleterre a su se purger. Et il ne suffit pas à Vico de dire qu'il y a une barbarie réfléchie dans laquelle les nations retombent par le vice de leur vie morale comme une barbarie native d'où elles sortent. L'histoire a-t-elle donc un seul exemple qui justifie ce décourageant pronostic? Citerait-on une seule nation qui se fût ainsi affaissée sur elle- même pour changer tout a coup ses enfants en barbares? Qu'une nation puisse décliner et glisser sur les pentes de la décadence , quand ses mœurs s'altèrent et que la force ne lui vient plus d'en haut, nous le savons. Cette décadence aura nécessairement un terme ; elle finira par la conquête du peuple abâtardi ou bien elle s'arrêtera pour faire place à un retour de vigueur, si d'elles-mêmes, comme il arrive quelquefois, les mœurs se rétablissent. Mais, quand la bar- barie cessera au-dehors, que Vico la refasse au-dedans ; qu'il imagine que les peuples civilisés iront de leurs propres mains anéantir la civilisation ; qu'il croie que, sur le sol sacré où s'élèvent nos demeures, nous enfanterons nous- même des barbares faisant comme ces soldats francs et vé- nitiens qui autrefois, a la prise de Constantinople, portaient par les rues, en signe de dérision, une plume, du papier et une écritoire, lamentable injure à la gloire des sciences, des lettres et des arts, non, nous n'en prendrions pas seu- lement à témoignage la civilisation et ses grandeurs, nous en attesterions la patrie et son cœur immortel " ces choses- . la ne sont que la folle prédiction d'un système ! et si, ce qui ne s'est jamais vu, elles devaient une seule fois con- trister le monde, ce n'est pas du moins sur leur retour pé- riodique, sur la profanation incessante des splendeurs de