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LE PÈRE DE LA CHAIZE. 239 eussent toujours été d'ailleurs un invincible obstacle à ce qu'elle devînt la maîtresse de Louis XIV ; d'un autre côté, le retour de ce prince à la pratique de ses devoirs était trop sincère, il croyait trop à la vertu de celle qu'il jugea digne de devenir sa com- pagne , pour avoir songé à la mettre sur la même ligne que jfmes d e Montespan et de Fontanges. La délicatesse extrême des sentiments de la marquise, sa discrétion, sa modestie, la sûreté de son esprit et de son caractère , sa droiture , son désintéresse- ment à toute épreuve, le charme inexprimable de ses entretiens, son humeur égale, et une facilité rare à ne jamais faire prévaloir ses goûts et ses penchants, tant de qualités réunies avaient amené ce prodigieux résultat. Elle était d'ailleurs belle encore, bien qu'elle eût cinquante ans ; ses grands yeux noirs avaient con- servé toute leur vivacité et tout leur feu, et ses traits, d'une re- marquable pureté de lignes, semblaient défier les injures du temps. « Elle avoit, ajoute l'abbé de Choisy dans ses singuliers Mé- moires , les yeux si vifs, si brillants , il petilloit tant d'esprit sur son visage quand elle parloit d'action, qu'il étoit difficile de la voir souvent sans prendre de l'inclination pour elle. » Saint- Simon lui-même, qui l'a si odieusement calomniée, convient « qu'elle avoit beaucoup d'esprit, une grâce incomparable à tout, un air d'aisance et toutefois de retenue et de respect, avec un langage doux, juste, en bons termes, et naturellement éloquent et court. » Ainsi elle promettait à Louis XIV tout ce qui pouvait le délas- ser et le distraire des pompes et des ennuis inséparables de la royauté. Le P. de la Chaize fut chargé par le roi des premières démar- ches. S'il faut en croire La Beaumelle, qui est ordinairement assez bien informé, Mrae de Maintenon, après avoir accepté avec une reconnaissance mêlée de trouble la demande d'un si grand mo- narque, une fois rendue à la réflexion, se serait alarmée du secret exigé. Ce sentiment de délicatesse de sa part n'aurait rien eu que de naturel. Le P. de la Chaize aurait triomphé de ses hésitations en lui faisant comprendre que cette- union était le seul remède Ã