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230            DE LA PHILOSOPHIE DE L'HISTOIRE.

 ce dernier point de vue, Bossuet, libre en quelque sorte du
 ministère de l'écrivain sacré et ne faisant que juger les purs
 effets de la politique, s'est élevé à une hauteur de génie que,
 selon nous, jamais historien n'a surpassée.
    Il laut le dire, ces grandes œuvres si monumentales et
 si belles sont l'orgueil de la foi qu'elles satisfont complè-
 tement, mais elles ne construisent pas comme science,
 avec les conditions que toute science exige, la philosophie
 de l'histoire. Telle n'est pas au surplus leur prétention.
 Elles partent de la révélation pour nous donner la solution
 religieuse du Christianisme sur le problème des destinées
 humaines. Or, ni ce point de départ, ni ce but particuliè-
 rement défini ne conviennent a la philosophie de l'histoire.
 Le point de départ de celle-ci, légitime ou non (il ne s'agit
pas de le discuter) c'est la raison avec ses lumières propres,
avec ses moyens de contrôle, avec ses caractères de certi-
tude. Le but de la philosophie de l'histoire n'est pas non
plus d'aller h la solution du problème dans le sens où
le Christianisme nous l'a présentée. Que le mystère de
la rédemption s'accomplisse, que la souillure de la race
d'Adam soit purifiée par le sang versé sur la croix, que
l'Eglise triomphante prenne possession des biens éternels
qui lui sont réservés, qu'ainsi s'achèvent dans l'autre vie les
desseins de Dieu sur les hommes, c'est là le drame de la
religion, le postliminium de ce qui se passe sur la terre,
ce qui sera postérieur à l'histoire en quelque sorte dans le
ciel : sous ce rapport, nous n'avons qu'à nous incliner dans
la docilité douce de la foi aux enseignements du Christia-
nisme. Mais le drame terrestre de l'histoire a-t-il de la sorte
été esquissé? Savons-nous pour cela ce qui regarde les vicis-
situdes de cette scène à perpétuels changements où parais-
sent non seulement les hommes, mais aussi les peuples ?
Avons-nous appris si les peuples n'ont pas aussi de leur