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 Mais l'esprit ne peut-il, libre cosmopolite ,
 Sans s'écarter du sort, reculer sa limite ?
Plus il va, plus le sol se raffermit sous lui ;
 L'axe de l'univers , voilà son point d'appui.
Puisque tout ici-bas doit remplir sa mesure ,
Qui satisfait le mieux le vœu de la nature ?
Est-ce l'homme isolé, dont l'esprit inactif
Reste en un coin du globe obscurément captif,
Ou l'homme qui déploie, en visitant le monde ,
De son génie ardent la puissance féconde ,
Agrandit sa raison, invente , en découvrant,
Et de la vérité, studieux conquérant,
Du savoir rassemblé des deux bouts de la terre
Rapporte à son pays le trésor tributaire ?
Car je ne prétends pas qu'un départ sans retour
T'exile pour jamais de ton natal séjour.
Ne fais pas d'un goût noble une sotte manie ;
Des peuples à loisir médite le génie ;
Compare chaque objet ; tout voir , sans rien juger,
C'est courir les chemins, ce n'est pas voyager.
De ces forces instruit, un esprit juste et sage
Souvent, s'il apprend moins, profite davantage.
Règle donc ton essor, mais n'abandonne pas
Le champ où tant de fleurs vont naître sous tes pas.
Es tu pauvre ? à tes yeux de ses mille spectacles
L'imposante nature étale les miracles.
Poète? prends ta lyre et l'homme et l'univers
Vont comme un double écho résonner dans tes vers.
Savant ? l'antiquité ressuscitant sa gloire ,
Avec de vieux débris te rebâtit l'histoire.