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est déjà au courant, et d'apprendre que Lamotte lui-même vient
de réciter les couplets par cœur à M. de Lafaye.
    11 ne fut pas difficile à Boindin de prévoir sur-le-champ le r é -
sultat de l'indiscrétion de Lamotte ; il connaissait le caractère
bouillant de M. de Lafaye, et il sentit fort bien que tout cela fi-
nirait autrement que par des plaisanteries.
    En effet, le soir m ê m e , au sortir'de l'Opéra, M. de Lafaye at-
tend Rousseau, dans la rue des Bons-Enfans , et tombe sur lui à
grands coups de canne. Rousseau se réfugie au Palais-Royal, e t ,
le lendemain, il rend plainte chez le commissaire de police Dami-
nois. De son côté, M. de Lafaye rend plainte en calomnie chez le
commissaire de police Bizotton ; il obtient permission d'informer,
et, sur l'information, il fait décréter Rousseau de prise de corps.
Cependant, la cour s'étant mêlée d'un accomodement entre
M. de Lafaye et Rousseau, les deux parties se désistèrent, et
Rousseau se retira avec un arrêt de décharge , rendu le 24 m a i ,
à la Grande C h a m b r e , sur les conclusions de M. de Lamoignon.
    Rousseau, indignement maltraité pour des couplets dont rien
 ne prouvait qu'il fût l'auteur, devait-il s'en tenir là ? ne se regar-
 dant pas comme suffisamment justifié dans l'opinion publique ,
 il voulut remonter à la source des c o u p l e t s , bien résolu d'en
 faire punir l'auteur, s'il parvenait à le découvrir.
     L'information faite en conséquence de la plainte rendue par
 M. de Lafaye, établissait que le décroteur avait reçu le paquet
 des mains d'un savetier , au coin de la rue Christine, e t , malgré
 toutes les recherches de la justice, ce savetier était toujours resté
 inconnu. A force de réfléchir sur le portrait fait du savetier par le
 décroteur, il vint à la pensée de Rousseau, que ce pouvait bien
 être un savetier, nommé Guillaume Arnould, qui travaillait à la
 porte de Saurin, et qui faisait ordinairement ses commissions.
 Plein de cette i d é e , Rousseau fait venir le décroteur, et il le con -
  duit lui-même à la boutique du savetier , pour voir s'il le recon-
 naîtra. Non seulement le décroteur reconnaît le savetier , mais le
  savetier reconnaît si bien le décroteur, qu'il en perd tout-à-fait
  contenance et se trouble au point de ne pouvoir indiquer la de-
  meure de Saurin. Par le plus grand hasard du m o n d e , il se trouve
  q u e , le savetier a ce jour-là, le même habit qu'il portait lorsqu'il