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tu n'en auras p a s , marmota-t-il de toute la force de ses jeunes
poumons, tu n'en auras pas^ oncle bistef'!
   M. M... laissa tomber sur moi un regard d'un inexprimable d é -
couragement. — Vous v o y e z , monsieur ? jusqu'aux enfans! jus-
qu'aux enfans de ma famille!
   Je n'avais pas exactement entendu le bambin. — Je ne com-
prends p a s , répondis-je. —Vous ne comprenez pas? Oncle bis-
tef, oncle bistef, répéta l'enfant qui s'enfuyait comme il était
venu.
   Je commençai à saisir.—Imaginez-vous, monsieur, que d'un bout
de la vallée à l'autre, c'est-là le nom qui vient s'accoler au mien !
 M... Beefteack d'ours!...Pour surcroîtde guignon, nous sommes
deux M..., et si quelqu'un s'en va demandant par hasard : « M.
M... s'il vous plaît? » — Lequel répond-on aussitôt ? le beefteack
d'ours, ou l ' a u t r e ? — C'est à n'y plus t e n i r , et vous concevez
maintenant, monsiem*, l'impression qu'aproduite sur moi votre en-
trée , et ce que j'ai dû penser du singulier appétit que vous m e .
m a n i f e s t i e z . — R â s t , b a s t ! dit Coutet; le vieux Balmat se laisse
bien appeler Mont-Blanc tout le long du j o u r , et au lieu d'en
prendre la mouche il s'en fait fièrement b e a u , allez ! — Ce n'est
pas tout-à-fait la même chose , Coutet, reprit mon hôte. Vois-tu ,
le Mont-Blanc et un beefteack d'ours , quelque bien apprêté qu'il
soit, çà ne réveille plus les mêmes idées du t o u t , Coutet. Et a-
joutez à c e l a , monsieur, la joie féroce de mes confrères de la
vallée qui sont tous mes rivaux, et qui ne manquent pas de styler
les voyageurs et d'exploiter la calomnie de leur mieux. M. Dumas
leur a fait l e j e u b e a u , i l faut en convenir.
   J'avais repris le volume. — Tournez à la page 208 , me dit M.
M... L à , tenez ; il s'agit de la prétendue veuve de Guillaume , et
voilà M.Dumas qui n'a pas honte de raconter que je sollicitai
sa bienfaisance en faveur delà souscription qui s'était ouverte chezmei
ainsi que chez tous les aubergistes et que sa générosité ne me laissa pas
même le temps d'achever ma supplique. Or ,savez-vous ce qu'il est ré-
sulté de ce conte-là? — Je ne l'entrsvois même pas. — l i e n est ré-
sulté ce qui devait nécessairement en résulter. Les maîtres d'hô-
tel de la vallée n'ont pas manqué de crier à tort et à travers :
«M. M . . . . , a h ! oui, c'est un joli farceur! s'il sait aussi bien ac-