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                  Cher Rousseau, ta perte est certaine ,
                Tes pièces désormais vont toutes échouer :
                En jouant le Flatteur, tu t'attires la haine
                  Du seul qui te pouvait louer.

    Gacon avait d'intimes liaisons avec un peintre médiocre , nom-
 mé Poerson , et ils étaient remplis d'admiration l'un pour l'autre.
 Afin de se venger de Gacon et de ses continuelles attaques, Rous-
 seau fit encore l'épigramme que voici :

                  Gacon, rimailleur subalterne ,
                  Vante Poerson le barbouilleur,
                  Et Poerson , peintre de taverne ,
                  Vante Gacon le rimailleur.
                  Or, en ce cas, certain railleur
                  A dit qu'ils sont tous deux fort sages ;
                  Car , sans Gacon et ses ouvrages,
                  Qui jamais eût vanté Poerson ,
                  E t , sans Poerson et ses suffrages,
                  Qui jamais eût vanté Gacon?

    Cette petite guerre , continuée de part et d'autre avec le plus
 triste acharnement, aboutît enfin aux infamies contenues dans
 l'Anti-Rousseau, libelle atroce inspiré à Gacon, non point par la pas-
 sion de l'argent, comme quelques-uns ont eu l'air de le croire, mais
 par la rage la plus violente, et dans la seule etbrutale vue de satis-
 faire ses sentimens de haine et de vengeance. Il n'est pas dou-
 teux que les pièces dont se compose ce libelle horrible, dans
lesquelles Gacon s'adressait tantôt au r o i , tantôt à M. de Pont-
chartrain, chancelier de France, tantôt à Daguesseau , procureur-
général , tantôt à R o b e r t , procureur du roi au Châtelet, où il ne
cessait, soit en vers , soit en prose , d'attaquer Rousseau sous le
double rapport de la religion et des mœurs , n'aient très-puissam-
ment contribué à la perte de l'adversaire de Saurin, et n'aient en-
traîné la condamnation d'un homme de t a l e n t , dont la culpabi-
lité n'a jamais été victorieusement démontrée.
  L'Anti-Rousseau , imprimé à Rotterdam en 1712 , est un in-12
de 534 pages , dans lequel on compte au moins cent quarante
rondeaux, ballades ou épigrammes dirigées contre le Pindare