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339 wei du Poète sans fard, il est impossible de ne pas reconnaître queGacon, tout hargneux qu'il était, savait pourtant se renfer- mer dans les bornes d'une critique décente. La vérité est qu'il n'y a rien de violent, d'emporté, de scandaleux enfin dans ses satires contre un banqueroutier , contre les faux dévots , contre les partisans, contre les détracteurs de la poésie, et surtout des poètes modernes. La satire contre Laurent Pégurier, auteur d'une censure morale du théâtre, offre de la modération et du raisonne- ment ; le passage que nous allons en citer en fournit une preuve incontestable : Le théâtre, appuyé du pouvoir monarchique , Redoute peu l'effort de ta fade critique t Et l'on verra toujours cet innocent plaisir Des plus honnêtes gens occuper le loisir. Jadis, quand il offrait d'infâmes caractères, Je sais qu'il attira la censure des Pères ; Alors, chez les romains, un acteur effronté Du discours à l'effet poussait l'impureté, Et, par un coup barbare, ensanglantant la scène, Donnait à tout le cirque une joie inhumaine ; Atrée y préparait un horrible festin, Et Médée y venait le poignard à la main ; L'un et l'autre, égorgeant d'innocentes victimes, A la fable ajoutaient de véritables crimes ; Alors, avec raison , dans leurs discours pieux, Les Pères défendaient ce spectacle odieux. Mais, depuis qu'à la foi, Rome, par eux soumise, Eut goûté quelque temps le doux joug de l'église , Le théâtre reprit son aotique splendeur, Et ne s'écarta plus des lois de la pudeur ; Loin de le condamner, les Saints Pères eux-mêmes Voulurent l'embellir par de sacrés poèmes, Et c'est dans cet esprit qu'on a vu si long-temps Nos mystères en proie aux auteurs ignorans. Sous ses deux derniers rois, la France, plus polie, De ces vieux historiens reconnut la folie , Et, laissant l'évangile à traiter aux docteurs, Chercha d'autres sujets propres à ses acteurs. Corneille , après Rotrou , de la savante Grèce