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    L a noblesse a donc parfaitement choisi son gîte ; il corres-
 pond en tout point à ses habitudes de vie sociale, à ses exigèances1
 de vanité. Par son éloignëmënt de la fournaise commerciale, ce
 quartier se prêle merveilleusement aux nécessités de la vie élé-
 gante. On peut s'y lever lard, parce que le sommeil n'y est point
 troublé par lés bruits de rue ; on peut saisir au passage chaque
rayon d'un soleil d'hiver, parce qu'on a le temps de se promet
 her ; puis on se trouve réuni en c a s t e , en famille, en société
 dans le même r a y o n , presque dans le même nid.
     Toutefois il né faut pas conclure que dans ce nid, plus qu'en
 tout a u t r e , on vive d'une vie intime, patriarchale, avec esprit
 de c o r p s , bienveillance, réciprocité d'obligeance. A Bellecour
 comme aux Terreaux, Cd sont des hommes qui s'agitent sur la
 scène, et qui y montent avec leurs passions et leur mesquinerie.
 Là se reproduisent les misères de la société humaine sous d'au-
 tres masques et d'autres faces, mais avec non moins d'intensité
 et de variété. Là le primus iriter pares agite toutes les convoi-
 tises; là éclatent des divisions plus ou moins tranchées en opi-
 pinion politique, en mœurs sociales, en pratiques religieuses,
 et l'individualisme, triste épidémie d'une société égoïste et cor-
 r o m p u e , exerce aussi ses ravages contre ces hommes qui pré-
 tendent conserver la tradition du p a s s é , parce qu'ils en ont
 peut-être les vices et les ridicules.
    Sous la restauration, la lutte engagée entre les libéraux et les
royalistes servait de ciment à toutes les opinions individuelles.
Royalistes-raisonneurs, ullrà-royalistes, congréganistes, jansé-
nistes, toutes les diverses nuances d e l à société bourbonnienne,
trouvaient un point de rencontre dans les efforts d é p a r t i , dans
une volonté commune, dans des intérêts identiques. Cela n'existe
plus aujourd'hui : en politique personne n'est d'accord ; les uns
admettent l'abdication , les autres non ; quelques-uns, las de res^
ter hors du mouvement du m o n d e , se sont arrangés de Louis-
Philippe, du moins momentanément. Chacun se t r i e , s'épluche,
se case suivant certaines Conditions dont on faisait autrefois le
sacrifice dans les salons du préfet ou du général. Le grand lierl
d'affinité se trouvant rompu, les classifications de société se sont
établies suivant des similitudes ou des différences.