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le nombre des métiers était de dix mille sept cent vingt, et 1825, après l'ins-
tallation définitive des Jacquards, de vingt mille cent un. Aujourd'hui sur trente-
deux mille métiers qu'emploient Lyon et la banlieue , ces machines ingénieuses
comptent pour près d'un tiers. La population qui exploite cette industrie forme
un ensemble de soixante mille personnes dans sept mille ateliers.
   Maislà ne se borne pas l'importance de cette invention. Le métier Jacquard est
partout aujourd'hui, s'appliquaut aussi bien aux étoffes mélangées de soie et de
laine ou de coton qu'aux tissus de soie etd'oï ou d'argent. Paris compte an assez
grand nombre de ces machines ; elles sont installées dans la plupart de nos villes
manufacturières, et les étrangers ont appris à s'en servir. Blanehester compte déjà
près de deux mille Jacquards.
   Maintenant la machine de l'ouvrier lyonnais a pris place parmi les plus puis sans
moteurs de l'industrie. Ce nom, prononcé d'abord avec rage dans les ateliers, est
populaire dans toute l'Europe. Mais cette gloire est venue tard ; il a fallu que
Jacquard fût, doué d'une persévérance égale à son génie. Pendant vingt ans, H
lutta péniblement contre l'ignorance et contre l'envie. En 18-13, les nouveaux
métiers n'étaient pas encore adoptés par l'industrie ; dix ans après , l'Angleterre
les importait avec éclat. Cette révolution fut secondée par deux manufacturiers
>ntelligens , MM. Dépotvillyet Sehirmer. Ces hommes de cœur avaient compris les
 premiers toute l'importance de la découverte ; ils bravèrent les obstacles et le»
 dangers pour la mettre en activité. L'histoire ne doit pas oublier, dans le réci 1
de cette courageuse initiative , le mécanicien Breton , ni le fabricant Culhiat. Ces
«oms sont associés par la reconnaissance publique au nom dé Jacquard.
   Les fabrieans qui les imitèrent, une fois les obstacles aplanis , arrivèrent faci-
lement à la fortune. Ils sont devenus riches, disait un jour Jacquard, et je suis
resté dans ma trés-modique fortune. Je ne m'en plains pas, il me suffît d'avoir
été utile à mes concitoyens. — Votre vîïle, lui disait un étranger de haute dis-
tinction, n'a pas été à votre égard d'une grande magnificence. Oh1, c'est bien assez ,
répondit-il, je n'en ai pas tant demandé, et je n'en voudrais pas davantage.
   Le désintéressement dé Jacquard n'était comparable qu'à la droiture de son
cœur. Il obtînt plusieurs brevets d'invention qu'il négligea d'exploiter. Les étran-
gers lui firent des offres magnifiques : il les refusa sans faste , mais avec fermeté.
Peu soueieux de la fortune , il s'engagea avec le conseil municipal de Lyon, au
prix d'une pension modique , à consacrer tout son temps et ses travaux au service
de la ville , et à ta falrejouir de tout perfectionnement à ses précédentes inventions.
En 1819, après l'exposition, il reçut la décoration de la Légion-d'Hoimeur, dis-
tinction dont il était fier , mais qu'il n'avait point sollicitée.
  Sur la fin de sa vie, il s'était retiré dans une maisonnette d'Oullins, à une
Keue de Lyon. C'est là que d'illustres voyageurs, des savans, des hommes d'Etat,
Venaient le chercher, tout étonnés de l'existence modique d'un homme dont le
nom était européen ; car ce n'est pas ainsi que les nat|ohs devraient récompenser