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31 ble fiacre, le cabriolet l é g e r , ou le bannal omnibus. J'ai vu dans nia jeunesse des chaises à porteurs de louage sur la place des Terreaux , près l'hôtel du Parc. A présent qu'on ne connaît de chaise à porteurs que celle que le marquis de Mascarillo fait entrer dans le sallon des Précieuses Ridicules, on ne s'accoutume pas à l'idée d'un homme en santé , bien dispos, porté par deux autres hommes dont la poitrine oppressée par de fortes bretelles, les muscles t e n d u s , les veines gonflées annonçaient la fatigue, et qui remplissaient, exposés aux. injures de l ' a i r , l'office de bêles de somme. On devait rire en voyant un abbé jeune et fleuri, remplir de son embonpoint une chaise destinée, à la vieillesse impotente. Je regardais un jour une chaise à porteurs qui transportait une pauvre vieille femme- à l'Hôpital. Elle était p e i n t e , dorée ; quoique ternie on distin- guait sur les panneaux des chiffres formés par des guirlandes de fleurs. YoiJà , me d i s - j e , une chaise qui a appartenu à une grande dame ? Point du t o u t , me dit un érudil de ma connais- sance , très-fort dans la science héraldique , elle a appartenu à un chanoine de notre égl;sc Saint-Jean. Il me fit r e m a r q u e r , en effet, les armes qui étaient à la p o r t i è r e , soutenues par le lion et le grillon du noble chapitre de Saint-Jean ; la couronne d e c o m t e , car ces chanoines étaient comtes ; la crosse et la mitr-e, car ces Messieurs officiaient avec les ornemensépiseopaux ; enfin la croix émaillée , ornée de fleurs de lys , et le ruban d'ordre qui décorait cette chaise comme celle d'un prince empourpré de l'église. Il y a loin , pensé-je , de ce faste-là aux sandales et au bâton blanc des premiers apôtres. J'ai v u , dans ma j e u n e s s e , quelques médecins de Lyon se servir de la chaise à porteurs. Je vois encore sortir de sa chaise certain docteur, couvert d'une vaste p e r r u q u e , monter grave- m e n t , appuyé sur sa canne à pomme d ' o r , au dernier étage d'une maison de la rue N o i r e , pour assister un pauvre d i a b l e , car il était charitable, quoique médecin fort occupé. Mais déjà on se permettait de rire de cette façon d'aller. Des médecins se coiffaient comme tout le monde , portaient des habits de couleur et ne croyaient pas qu'il fut néceessaire à un docteur de feindre la vieillesse et d'affecter des manières d'autrefois. Téméraire