page suivante »
LYON EN NOVEMBRE 1 8 7 0 . 443 A Lyon, comme ailleurs, les opinions sont partagées, tant sur l'issue définitive de la guerre que sur ses consé- quences politiques et financières. Les uns pensent qu'il faut à tout prix en finir avec cette lutte inégale ; ils esti- ment que notre armée permanente est détruite, prison- nière de guerre ou renfermée dans des places fortes, où elle peut tout au plus se maintenir ; qu'il faut signer une paix quelconque et se préparer,à une revanche. Les autres sont d'avis qu'au point où nous en sommes, nous ne pouvons être plus bas, qu'il faut lutter et lutter jus- qu'au bout, sans cesse, sans relâche. Ils affirment que la vérité se fait jour peu à peu dans le pays, et que l'excès du mal peut seul engendrer le remède; suivant eux, la nation se lève, lentement il est vrai, comme peut le faire une nation assoupie, engourdie, mais enfin elle se lève; nos ressources sont immenses, et un peuple entier qui ne veut pas, ne peut pas mourir. Quelques grands négociants et banquiers désirent la paix, sans se dissimuler que la guerre civile est au bout. Tout ce qu'ils demandent, c'est une accalmie de quelques semaines qui leur permette de liquider leur position et de porter ailleurs leurs capitaux et leur industrie. La ré- publique rouge les effraie, la perspective d'une paix qui ne serait qu'une trêve armée leur enlève la sécurité né- cessaire au succès de leurs entreprises ; ils veulent aller demander à un pays neutre la stabilité que cesse de leur offrir leur patrie. Tous, Dieu merci, n'en sont pas là ; mais ils sont en route pour y arriver, et chaque mesure violente mise en avant par le parti radical les pousse dans cette voie. C'est une vérité par trop banale que de dire que les capitaux ont besoin de confiance et disparaissent ) quand elle leur fait défaut. Tout banal que soit l'axiome, il ne faut pourtant pas se lasser de le répéter. C. DE V,