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88 LE PAGE DU BARON DES ADRETS.
A la vue de sa longue robe noire, la foule s'écarte et
le laisse pénétrer dans la maison ; les huguenots l'entou-
rent, Blancon lui explique le terrible événement; le mé-
decin écoute, examine le malade et réfléchit.
Bientôt sa figure se rassérène ; il interroge encore,
mais rassure ; il craint que le sang ne frappe le cerveau
et ordonne les soins qui doivent combattre le danger ;
un barbier habile, prévenu en même temps, reçoit les
prescriptions du docteur et tire du bras du malade une
abondante quantité de sang.
A mesure que le sang jaillit, la vie semble revenir
dans ce corps si rudement frappé ; la peau tressaille et
se colore, la respiration se rétablit plus douce et plus ré-
gulière, la paupière fait un mouvement, et l'œil étonné,
après s'être ouvert fixe et morne, s'anime, reprend l'in-
telligence et cherche à reconnaître les personnages et les
lieux.
Mais sur un geste du médecin, Blancon a fui ; on craint
que sa présence ne trouble le malade ; les huguenots se
sont éloignés ; cachés, ils écoutent et espèrent ; un vieil-
lard vénérable est seul auprès du médecin, Beaumont
les contemple tous les deux.
— Vous souffrez, général, dit le vieillard d'une voix
compatissante et affectueuse. Allez-vous mieux ?
— Je souffre ? non. Je suis faible, brisé; mais, par
le diable, où suis-je ? et comment me trouvé-je ici ?
— Vous êtes chez des amis, général ; vous êtes hors
de danger, sous la direction d'un médecin aussi instruit
que dévoué ; vous n'avez besoin que d'un peu de repos
et de sommeil, et demain vous aurez retrouvé votre
santé et votre vigueur.