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                      LE BOUQUET ÃATAL.                       Ifi5

   — Adieu, Remy ; ou plutôt, au revoir. Nous achèverons nos
noces là-haut, dit-elle avec un pâle sourire.
   Ici-bas, je ne vous demande plus qu'une grâce. Quand re-
viendra le printemps, portez sur ma tombe un bouquet de roses
nouvelles. Celles que j'ai tant aimées, vous savez ? Cela réjouira
ma cendre.
   Une douée et paisible agonie éteignit les derniers souffles de
!a belle créole .                                                ,


  C'est pour obéir au suprême vœu de cette chère morte, que
Remy se trouvait ainsi dans le cimetière du Montparnasse le
matin du 22 mai 1847.

                               IX

   Le soleil était déjà haut sur l'horizon quand îe jeune docteur
quitta la tombe de sa bïen-aimée.
   Pour se remettre un peu de ses émotions, il parcourui les
allées ombreuses de la nécropole, s'arrêtant çà et là vers quel-
ques mausolées où semblait l'attirer une secrète sympathie.
Ainsi fit-il devant celui du doux et cher poète Hégésippe Mo-
reau, et ce n'est pas sans attendrissement qu'il salua le buste
du chantre de la Voulzie. Il contempla longuement la tombe du
fier et fougueux Armand Carreî, dont la mémoire alors était
encore si vivace dans la jeunesse des Ecoles.
   Remy semblait s'arracher avec peine à ce sol fait de la cendre
de tant de générations et qui gardait dans ses flancs l'idole
brisée de sa vie.
   11 se rapprochait cependant de la grande porte d'entrée quand.
il fut arraché à sa rêverie par le bruit voisin de plusieurs voix
dont le timbre tapageur n'était pas en harmonie avec la silen-
cieuse majesté du lieu. De rauques éclats de rire, des interjec-
tions bruyantes se croisaient avec des propos lestes et avinés ;
 c'étaient des voix d'hommes et de femmes mêlées.
    Cet fedécent colloque le fit frémir et l'irrita comme plusieurs