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226                     DEUX AMITIÉS

 s'enquit de mille choses ; enfin les questions et les réponses
 se succédèrent rapidement.
    C'était véritablement providentiel que Marie fût entrée
 dans ce magasin. Elle avait dû perdre son porte-monnaie
 en payant le cocher qui l'avait conduite chez Mathilde ou
plutôt, il lui avait été soustrait par un des nombreux pas-
 sants qui l'avaient coudoyée depuis qu'elle était sortie de la
maison de son indigne amie.
    C'était l'heure du dîner de Marianne et de sa famille. La
brave femme voulait servir Marie à part ; celle-ci n'y consen-
tit pas et s'assit à la table de son ancienne bonne. Quoique la
jeune fille eût encore le cœur bien gros, elle avait éprouvé
de telles angoisses en sortant de chez Mathilde, puis en se
voyant abreuvée d'outrages et sans une seule pièce d'argent
dans Paris, que le moment présent lui semblait bien doux.
    Elle conta ensuite à Marianne toute son histoire et lui
demanda conseil, sur ce qu'elle devait faire. L'âge de cette
femme, le bon souvenir qu'en avait gardé Mme Desnoyelle,
l'affection qu'elle témoignait à la jeune fille, expliquaient
suffisamment cette confiance.
    Lorsque Marie eût terminé, Marianne réfléchit un ins-
tant, puis lui dit :
    — Le seul parti à prendre, ma petite, c'est de retourner
dès aujourd'hui chez votre mère. J'aurais bien désiré vous
garder pendant quelques jours, malheureusement je n'ai pas
de logement à vous offrir, et mon magasin n'est pas un
endroit convenable pour une jeune fille telle que vous. Je
vais vous accompagner à la gare ; vous vous installerez dans
un compartiment de dames seules, et vous y serez à l'abri
de toute mauvaise rencontre. Vous m'écrirez, n'est-il pas
vrai, ce soir môme ?
   — Oui, ma bonne Marianne, et je vous ferai rembourser
bientôt ce que vous m'avez avancé.