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                       DEUX AMITIÉS                      225
    — Non, pas sans vous avoir donné un gage, dit Marie
en se remettant un peu. Tenez, voici un couteau de poche
à lame d'argent, je le ferai reprendre chez vous contre la
faible somme que je vous dois. Mais que vais-je devenir,
mon Dieu !.., sans argent dans Paris !
    — Je puis bien vous prêter deux francs sur cet objet,
quoique je n'en aie nul besoin, dit la marchande en regar-
dant le couteau avec attention. C'est singulier, ajoute-t-elle
comme en se parlant à elle-même, il me semble avoir sou-
vent tenu ce couteau dans les mains, l'avoir nettoyé. De la
part de qui le réclamera-t-on, Mademoiselle ?
    — On vous le demandera de la part de Mlle Desnoyelle.
    — Desnoyelle, Desnoyelle, ah ! c'est un nom que je
 connais bien. J'ai servi pendant cinq ans chez un officier
 de cavalerie qui s'appelait ainsi. Seriez-vous sa parente ?
    — M. Charles Desnoyelle était mon père.
    — Quoi ! vous seriez Marie Desnoyelle, ma petite Marie
 que j'ai tant aimée; est-ce que vous ne reconnaissez pas
 Marianne Tourette ?
    — Vous êtes Marianne Tourette ! oh ! mon Dieu, merci.
    Pour la première fois de sa vie, Marie, brisée par ces
 émotions diverses, prit une légère défaillance. Marianne la
 combla de soins tout maternels. Elle était au désespoir de
 l'avoir traitée comme elle l'avait fait.
    — Chère enfant, lui dit-elle, lorsque Marie se fut remise,
 me pardonnerez-vous de vous avoir ainsi méconnue ? Je ne
 suis pas méchante, croyez-le bien, mais si vous saviez
 comme les aventurières abondent à Paris, comme il faut y
 disputer sa vie, vous ne penseriez pas du mal de moi.
    Marie s'empressa de la rassurer et lui témoigna sa joie de
 l'avoir retrouvée, surtout dans un moment si critique
  pour elle.
     Marianne demanda des nouvelles de Mrae Desnoyelle,
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