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23O                     DEUX AMITIES

contre sa volonté. Mais le papier n'était plus son confident,
les paroles ironiques de Mathilde retentissaient encore à
ses oreilles.
    Un jour que Wilhem, le frère de Mina, chantait une
suave mélodie de [Weber, celle-ci s'approcha de son amie
qui se tenait à l'écart le front dans les mains, et lui décou-
vrit doucement le visage : il était couvert de larmes.
    — Qu'as-tu? lui demanda-t-elle.
    — J'ai qu'il me serait doux de rendre ce qui éveille en
moi cette délicieuse musique; mais je ne le veux pas, car
tu le sais, cela ne serait bon qu'à être lu par l'épicier du
coin, fit Marie avec un rire nerveux.
    — Eh ! qu'importe à l'oiseau qui gazouille, répondit
 Mina à voix basse, que l'on entende ou non sa chanson ? Il
 chante parce que Dieu le lui a dit. Fais comme lui, Marie,
 ce n'est pas en vain que Dieu dispense ses dons. Quelque-
 fois, nous n'en comprenons pas tout de suite le but, plus
 tard il nous est révélé.
    Marie suivit les conseils de son amie, et de ce moment
 la paix se fit en elle; peu à peu ses joues reprirent leur
 incarnat, et son caractère son aimable entrain.
    Elle vivait depuis deux mois de cette douce vie, quand
 M. Werner lui annonça qu'il allait repartir, mais sans elle,
 attendu que sans la prévenir il avait écrit à Mmo Desnoyelle,
 d'après le désir de la famille Schmidt, pour la prier de lais-
 ser sa fille encore à Berne où sa santé paraissait se fortifier
 de jour en jour, et qu'elle y avait consenti volontiers. Marie
fut bien touchée de la bonté de ces excellentes gens et se
trouva heureuse de rester encore au milieu d'eux, quoique
la pensée de l'isolement de sa mère et la peine d'en être
 éloignée troublassent un peu sa joie.
  Pour mettre son temps à profit, elle se remit avec ardeur
à l'étude de la langue allemande qu'elle connaissait déjÃ