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                        DEUX AMITIÉS                       139
   Mathilde loua beaucoup la grâce, la fraîcheur de la com-
position et ne se permit qu'une légère critique de détail,
que saisit très bien la jeune fille, charmée d'avoir trouvé un
tel professeur. Mme Dermont lui fit promettre d'apporter le
lendemain d'autres pièces de son recueil et lui laissa enten-
dre qu'elle lui trouverait un éditeur.
   Marie rentra chez elle enthousiasmée de sa nouvelle
amie et le cœur rempli des plus douces espérances. Elle se
jeta avec effusion au cou de sa mère en s'écriant :
   — Nous pourrons enfin payer notre dette sans fatiguer
tes pauvres yeux à travailler à la lumière. Mme Dermont
me trouvera un éditeur.
   La dette dont parlait Marie avait été laissée par M. Des-
noyelle et était un sujet de grand souci pour la mère et la
fille.
   Il ne s'agissait pourtant que de la somme de deux mille
francs. Le créancier, ancien ami de M. Desnoyelle, n'avait
pas voulu que cette somme fût prélevée sur la faible dot de
femme d'officier qui restait à Mme Desnoyelle pour toute
fortune, et sur^ laquelle il ne possédait d'ailleurs aucun
droit : il avait accordé, pour la payer, un temps illimité.
Mais comme il n'était pas riche lui-même, et que Mme Des-
noyelle avait gardé un affectueux souvenir de son mari,
elle brûlait de décharger sa mémoire en amortissant com-
plètement cette dette. Elle n'y était pas encore parvenue.
    Dès le soir même, Marie veilla bien tard pour revoir avec
soin les poésies qu'elle devait le lendemain soumettre à
Mme Dermont.
    Elle y retourna ce lendemain et bien d'autres jours en-
core, mais sa mère ne s'en plaignit pas, quoiqu'elle vît
 avec peine que le travail de tapisserie qui constituait une de
 leurs principales ressources fût un peu négligé ; elle parta-
 geait les espérances de sa fille.