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LA PIERRE A ÉCUELLE 41 ne soient une attestation du passage de ce grand thauma- turge des Gaules, à travers nos campagnes, dans la seconde moitié du IVe siècle ? Nous en sommes d'autant plus con- vaincus, que ses annalistes nous apprennent, qu'il parcou- rut une grande partie de la Gaule païenne pour y prêcher les dogmes catholiques. Nous savons qu'une de ses œuvres les plus chères et les plus persistantes fut la destruction ou le discrédit des signes de l'idolâtrie ; il en suivit les traces jusque dans les lieux les plus écartés, dans les bois et les forêts principalement, où les Druides accomplissaient leurs sacrifices sanglants (1); il tint à démontrer, sur les lieux même, l'inanité de ces vaines pratiques cent fois séculaires ; pauvre et modestement mis, sous ses habits de moine (2), il lui fallut convaincre ses auditeurs par son éloquence ; il ne craignit pas devant eux, et sans que la foudre de leur dieu Taranis l'écrasât sur l'instant, de manger ou de boire dans les cavités sacrées qui servaient aux sacrifices ; il affecta de se coucher dans ces pierres creusées comme un tom- beau, où l'on tenait par force le malheureux pour lui arra- cher ses entrailles destinées à préjuger l'avenir ! (1) Pline dit que ce fut l'an 657 de Rome (96 av. J.-C.) que ces sa- crifices furent interdits, il est vraisemblable, cependant, que les Druides subsistaient encore à la fin du VIIe siècle : l'historien Procope a écrit ceci : Les François devenus chrétiens observent encore une grande partie de leurs anciennes superstitions; ils offrent des victimes humaines et pratiquent des choses exécrables qu'ils font servir à la divination. — De Chiniac, loc. cit., p. 45. M. Niepce constate à son tour, p. 176, que le culte des arbres et des fontaines persista longtemps dans les Gaules après le christianisme; on les plaça sous l'invocation des saints pour substituer ainsi le nouveau culte à l'ancien. (2) Saint Martin avait établi près de Poitiers, vers 360, le premier monastère connu en Gaule ; il subsistait encore du temps de Grégoire de Tours (539-593), qui en parle.