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                      KEN1S DE LUGINGE                   465

 sur ces objets, dernières consolations d'un malheureux,
 et elle interroge le religieux.
    Eeconnaissez en moi, Madame, dit-il, le prétendu ma-
gicien qui vous remit une lettre de Eené de Lucinge.
Sauvé par lui de la terrible influence des pirates, chez
lesquels il me rencontra, je m'attachai pouç jamais à mon
noble protecteur. De retour à Malte avec lui, j'entrai peu
après dans le couvent des moines franciscains de la ville
de Malte. L'année suivante commencèrent les longues lut-
tes avec Soliman, et René de Lucinge se couvrit de gloire.
Il y a six mois , il rentra dans l'île malade et découragé.
On l'entoura des plus tendres soin-, mais le mal qui mi-
nait son âme fit des progrès rapides ; il se prépara à la
mort, par la prière et les bonnes œuvres. Quelques
promenades sur les bords de la mer, des conversations sur
l'éternité et l'instabilité des choses humaines avec le véné-
rable grand-maître et quelques chevaliers qui l'aimaient
comme un frère, furent ses dernières consolations. «Pedro,
me dit-il, je vais mourir et je remercie le Ciel d'être dé-
livré de la vie; s'il eût. voulu une plus longue expiation,
je l'aurais acceptée, mais je suis un voyageur fatigué
pour lequel le repos sera doux. » Peu de jours après, mon
ami s'endormit dans le Seigneur, et tout l'ordre pleura
un de ses membres les plus distingués. Eené m'avait
dicté ses dernièfes volontés : vous voir, Madame et vous
remettre cette cassette, porter les derniers adieux à son
neveu, au comte de Groslée. Ma mission est remplie ; je
retourne à Malte pleurer sur le tombeau de René de Lu-
cinge, jusqu'au moment où Dieu me réunira au seul ami
qu'il m'ait donné sur la terre.
   Marguerite émue, recueillit avec respect les reliqnes
funèbres ; la rose blanche et les portraits furent replacés
dans la cassette, et la princesse voulut consacrer quelque?