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142 MON AMI GABRIEL — Merci, répondit Nelly à bout de forces. — Quand voulez-vous partir? reprit le baron. — Dès qu'il vous plaira... Demain. Je suis prête. VIII Le lendemain était un dimanche. La famille Delprat avait l'habitude d'assister à la messe avec Gabriel dans une petite chapelle bâtie à flanc de coteau, en dehors de la ville. Le chalet de Mme de Sérona était tout près de là et l'on s'y rendait presque toujours après l'office. La soirée de la veille s'était terminée de bonne heure. Après le départ subit de Nelly, les invités n'avaient pas tardé à comprendre qu'il se passait quelque chose de pénible. Gabriel s'était presque enfui et M 0 Delprat, ™ voyant toutes ses appréhensions se réaliser n'avait cher- ché à retenir personne. Le matin, dès sept heures, chacun se rendit, comme à l'ordinaire, à la chapelle. Au son clair et uniforme de la petite cloche, les paysans pressaient le pas, et les jeunes filles enrubannées marchaient gaiement leur livre d'heu- res à la main. La flèche gothique, étincelante au soleil et svelte comme un jeune pin, s'enlevait en vigueur sur les buis verts qui tapissaient le fond du tableau. Sous le porche de la blanche chapelle, des jeunes gens se groupaient graves et recueillis. Lorsque Gabriel eut franchi le seuil sacré, son regard interrogea bien vite les recoins de l'étroite enceinte : il aperçut Nelly agenouillée près d'un pilier et le visage plongé dans ses mains. — Kyrie eleison! Christe eleison!... La messe com- mençait; le prêtre, vêtu d'une chasuble de fête, venait de monter à l'autel. Des laurelles en fleurs étaient dis- posées symétriquement de chaque côté de la nef. La