page suivante »
LA GUERRE DES ARCHÉOLOGUES. 201 Tous les jours, des historiens travaillent a populariser les grandes actions de nos pères. Pourquoi railler ceux qui leur amènent des matériaux? Vous-même, Monsieur, ne cherchez-vous pas a vous rendre utile aux historiens futurs en consignant les faits contemporains dignes, à vos yeux, de quelque intérêt? J'ou- vre vos collections et je vois des études savantes sur les sapeurs-pompiers, la halle centrale ou l'éclairage au gaz. Je compulse vos faits.divers et j'y trouve : « Le Parc reçoit un nouvel ours ; les laveuses des plates de la Saône lisent avec enthousiasme le récit du combat naval de Châlon; un renard, surpris sur le coteau de Fourvières, est mis a mort sur le toit d'une maison de la montée Saint-Barthélémy. » N'est-ce pas de l'histoire et de la meilleure, et ne serions-nous pas heureux que le Lyon-Journal eût vécut du temps d'Auguste ou de Périclès? Votre renard ne vaut-il pas nos médailles? Les Plutarque et les Tacite de l'avenir n'auront-ils pas aussi des remercîments a vous voter ? 11 est des époques malheureuses où le flambeau des sciences s'éteint; on les appelle : époques de barbarie; l'Eu- rope eut, vers la fin du Bas-Empire, un ennui général du savoir, une insurmontable apathie pour ses exigences, une indifférence profonde pour ses formules. On riait des statues sans bras, des manuscrits indéchiffrables, des pierres tom- bales dont on. faisait des murailles. Ou a flétri cette époque du nom de Décadence. Il est des peuples, même de nos jours, qui chassent,mangent et dorment; ils n'écrivent pas, mais dansent; n'ont ni état civil, ni archives, mais comptent les chevelures prises a l'ennemi; on prétend qu'ils sont très- fiers, très-orgueilleux et qu'ils dédaignent tout homme qui ne marche pas avec eux dans le sentier de la guerre ; on les appelle des sauvages. Je crois qu'ils mépriseraient souve- rainement les médailles rouillées en général, et les travaux