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138 i/ORIENT D'EUROPE AU FUSAIN. Nous nous dirigeons avec empressement pour porter le secours de notre faible bras à ces fils de héros, et nous voyons les sabres très-occupées à déraciner du pissenlit. Le savant père avait aperçu de la salade et pensé qu'il n'était pas indigne du glaive des Athéniens de récolter* l'herbe savoureuse. Enfin, nous pouvons tout de même dire que notre es- corte a dégainé, c'est là , certes, une impression de voyage qui a bien son mérite. Chemin faisant, en redescendant, P a t e r Baconia nous apprend qu'il est Français'(!) ; qu'il a quitté Toulon (?) à l'âge de huit ans, qu'il a oublié sa langue natale, mais qu'à force de veiller, il a appris le grec et l'italien, qu'en- fin, ses études poussées avec vigueur, l'ont rendu digne d'être moine; il a soixante-quatorze ans,bon pied,—nous en avons la preuve,— bon œil et bonne dent. A la grotte, nous retrouvons la division militaire que nous avions laissée en montant. Un des soldats me dit qu'il y a dans les rochers, sous la voûte naturelle, une source qui tombant goutte à goutte s'est fait une sorte de bénitier où l'on peut boire. Je m'approche pour me rafraîchir, mais j'aperçois le révérend père qui plonge dans la cuvette son nez crasseux et sa barbe sale... me voilà désaltéré du coup. Nous déjeunons au couvent et nous employons toutes les ressources des saints moines pour réconforter notre armée, car nous n'avons apporté de vivres que pour deux. Nous avions seulement compté sur le vin du cou- vent; or, on nous sert d'abord une boisson atroce dans laquelle on a fait infuser de la résine; nous réclamons, et une sorte de Malvoisie assez délicat nous dédommage de notre premier essai. Il paraît, qu'à la rigueur, les bons pères savent trouver dans leurs caves des liqueurs moins austères,