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CINQ-MARS ET DE THOU. 107 « —Monsieur,c'est d'icy,c'est d'icy,Monsieur, que nous « devons aller en Paradis. » — Et, se tournant vers son confesseur : « — Mon père , est-il bien possible qu'une « créature si chétive comme moy doive, aujourd'huy, « prendre possession d'une éternité bienheureuse ? » « Le carrosse s'arrêta au pied de l'échafaud, et lepré- vost estant venu dire à M. de Cinq-Mars que c'estoit à luy de monter le premier, il dit adieu à M. de Thou et (ils) se congédièrent d'une grande affection, disant qu'ils se reverroient bientost en l'autre monde où ils seroient éternellement unis avec Dieu. Ainsi, M. de Cinq-Mars descendit du carrosse, et parut, la tête levée et d'un visage gay. Un archer du prévost s'estant présenté pour lui prendre son manteau, disant qu'il leur appartenons son confesseur l'en empêcha et demanda au prévost si les archers y avoient droit. Luy ayant dit que non, le P. dit à M. de Cinq-Mars qu'il disposât de son manteau comme il lui plairoit. Lors il le donna au Jésuite qui ac- compagnoit so"n confesseur, disant qu'il le donnoit pour faire prier Dieu pour luy. « Icy, après les trois sons de trompette ordinaires, Païenne, greffier criminel de Lyon, estant à cheval assez près de l'échafaud, lut leur arrest que ny l'un ny l'autre n'écoutèrent. Pendant quoy, on abattit le mantelet de la portière du carrosse, qui regardoit l'échafaud, afin d'en oster la vue à M. de Thou, qui demeura dans le carrosse avec son confesseur et son compagnon. « M. de Cinq-Mars ayant salué ceux qui estoient près de l'échafaud, se couvrit et monta gayement l'eschelle. Au second eschelon, un archer du prévost s'avança, à cheval, et luy osta, par derrière, son chapeau de dessus