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POÉSIE. MAI Déjà que d'ombre sous les branches, Que d'ombre sous le marronnier Tout pavoisé d'aigrettes blanches, Tout imprégné d'air printanier ! Le rossignol nous chante, au faîte, Son répertoire étincelant ; Mai vient de griser, pour sa fête, Ce petit chanteur ambulant. La terre, changeant de toilette, Arbore les vives couleurs : On cherche en vain la violette Qui fut l'hirondelle des fleurs. Au rayon d'or teinté de rose, L'infini du ciel s'est ouvert ; Ce matin,le sein de la rose Fait éclater son corset vert. Vite pour saluer la reine Accourt son page, un papillon, Mais aussitôt la brise amène Un gémissement du vallon. Le saule pleureur, dont la traîne Trempe dans l'eau de l'étang clair, Mêle son frisson d'âme en peine A l'allégresse du concert. A la jeune rose il soupire, Triste mémento du destin : « Dans la pourpre de ton sourire Tu pâliras avant demain. « Quoique reine, à ta sœur moins belle Le même avenir te confond : A peine une fleur éclot-elle Qu'elle a déjà sa larme au fond ! » Hugues BERTHIN.