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282                    INCURSIONS DES ROUTIERS,

les habitants consentaient à traiter, ils étaient écrasés de ré-
quisitions en nature et en argent. Les villes et les châteaux
forts qui avaient une garnison suffisante ou une population
assez nombreuse pour se défendre derrière leurs murailles ne
portaient aucun secours aux campagnes ; cependant les ha-
bitants des bourgs et des villages menacés de l'approche des
Routiers, avaient quelquefois le temps de se renfermer dans
les villes voisines.
   Cette inertie des villes paraît difficile à comprendre. Frois-
sart ne s'occupe point de critique historique. Il ne cherche
pas à pénétrer les causes des événements ; il se borne 5 la
narration des faits. Brillant historien des chevaliers, et comp-
tant pour peu tout ce qui n'appartient pas à la noblesse féo-
dale, il aime surtout à décrire les belles appertises d'armes
et excelle dans ce genre de description ; hors de là on ne peut
rien tirer de lui pour l'éclaircissement des faits.
   Ne pourrait-on pas supposer que la bourgeoisie des villes,
qui avait eu tant de luttes et de guerres à soutenir contre les
barons féodaux pour obtenir l'affranchissement plus ou moins
étendu des communes, voyait avec indifférence ravager, dans
les campagnes, les fiefs d'une noblesse batailleuse et pillarde?
Comment peut-on comprendre que les Lyonnais, lorsque la
plus grande partie des Tard-Venus étaient en Lombardie,
n'aient pas attaqué les trois ou quatre mille Routiers de
Seguin de Badefol, disséminés dans les villages de notre pro-
vince pour la mettre à contribution ? Ce n'étaient cependant
ni les milices ni le courage qui manquaient aux Lyonnais ; ils
l'avaient prouvé dnns la guerre sanglante qu'ils avaient sou-
tenue au siècle précédent contre l'Eglise de Lyon, pour ob-
tenir l'affranchissement de la commune lyonnaise (1), el

  (1) La ville de Lyon, inférieure en population à celle de Paris, était,'au
XIVe siècle, la plus importante du royaume par son commerce. Les émi-