page suivante »
NOTICE SUR J.-B. DUMAS. 97 l'orateur au caractère antique et respecté, Delandine, le savant bibliothécaire , le sculpteur Chinard , les peintres Revoil et Richard, Fourier, le cerveau hanté par les fantômes du phalanstère, et tant d'autres que je ne nomme pas pour ne pas frôler la limite qui m'approcherait des noms contem- porains. C'est la dans son salon dont sa femme et lui excel- laient à faire, avec une affabilité relevée de grâce piquante, les honneurs, que je voudrais vous représenter Dumas, pour prendre sur le fait sa vraie nature d'homme de lettres. Soyons sincères , Messieurs , gardons les distances. L'homme de lettres en province, quand il n'arrive pas jus- qu'à une réputation qui franchisse l'enceinte provinciale, ne saurait être comparé sans doute 'a de plus brillants fa- voris de la renommée, mais il est permis de demander pour lui une place encore durable d'estime dans les a/males locales, et son originalité vaut d'être étudiée. Avec le temps tous les types se sont transformés, celui de l'homme de lettres comme ceux de l'homme de guerre, de l'homme de robe ou de l'homme de finance. On peut ajouter qu'a ce fonds primitif de transformations, la province a apporté encore ses variétés particulières. Peut-être l'idée la plus générale a se faire d'un homme de lettres d'autrefois (les noms illustres mis a part bien entendu) lui attribuerait le ministère un peu sombre de l'érudition, à la façon des Casaubon et des Scaliger. Au XVIIIe siècle, sans que je songe à méconnaître les in- contestables services rendus par la philosophie, l'homme de lettres me paraît prendre plus souvent la figure du philosophe qui tient bureau ouvert de vérités et de maximes morales à l'usage du public et des gouvernements. A présent, si je ne me trompe, l'homme de lettres a principalement la physio- nomie de l'artiste et du politique. Il cède au goût passionné de notre temps pour les œuvres d'imagination et les arts ; le mouvement naturel de la société contemporaine l'entraîne 7