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N É C R O L O G I E . — LE COMTE SEBASTIEN DES GUIDI. On se rappelle avoir vu dans les salons les plus recherchés de Lyon un grand et beau vieillard dont les cheveux blancs, les belles manières, les traits sympatiques et distingues et la poitrine ornée de décorations atti- raient moins encore les regards que la vivacité de ses gestes, l'imprévu de ses aliures el son ardeur toute méridionale; cet homme en qui semblaient revivre ces nobles et vieilles races de l'Italie, polies, civilisées, et amies des arts comme les avaient faites les Médicis, n'était autre que le comte Sébastien Des Guidi , d'une ancienne famille florentine transportée à Naples et lui-même devenu Lyonnais par la chance des révolutions. Ce vieillard vénérable et bon vient de s'éteindre à 94 ans. Il ne nous appar- tient pas de juger la doctrine médicale qu'il avait introduite en France, mais sa haute notoriété, ses travaux, sa position de chef d'Ecole lui donnent droit à trouver place dans une Revue dont il suivait avec sympathie la marche et dont il encourageait les succès. Né le 5 août 1769 à Caserlc, au château de Guardia, dansée royaume de Naples à qui Dieu a prodigué toutes les beautés, le jeune Guidi fit de sérieuses et profondes études qui plus tard lui permirent de se suffire , lors- que les événements lui curent fait prendre le chemin de l'exil Compromis par ses relations avec le parti français, il fut obligé de fuir, \ i n t à Lyon en 1799, trouva quelques répétitions à donner (1), lut nommé prefes cur do mathématiques an collège de Privas, où un décret du II thermidor an XI lui conféra le titre de citoven français, revint à Lyon enseigner au Lycée les mathématiques et la physique, fut successivement nommé pro- fesseur à la Faculté de Marseille, inspecteur à l'Académie de Grenoble et, en 1819, inspecteur de l'Académie de Lyon; il venait d'être reçu docteur en médecine à la Faculté de Strasbourg. En 1804 il s'était allié à une riche et ancienne famille du Dauphiné. En 1821 , il se rendit à Naples où des affaires de famille l'appelaient. Une grave maladie ayant frappé Mme la comtesse Des Guidi, le docteur Romani la sauva en la traitant suivant les nouveaux principes découverts par Hahnemann. Touché d'une profonde reconnaissance, le comte Des Guidi étudie la nouvelle méthode, la pratique sous la direction de Romani et d'Hahnemann ; puis revient en 1829 à Lyon, où, avec une foi profonde et une ardeur extrême, il proclame les idées du réformateur allemand. Depuis 1834 il était inspecteur honoraire de notre Académie. En 1835, il reçut la décoration de la Légion d'Honneur ; en 1853 il est nommé, par le grand duc de Toscane, chevalier de l'ordre noble'de Saint-Etienne, distinction flatteuse qui n'est accordée, dit le décret, qu'aux gentils- hommes d'une noblesse incontestée, d'une réputation sans tache et d'une religion éprouvée; nous rappellerons encore en passant une médaille d'or qui en 1833 fut frappée en son honneur. Son_ salon possédait quelques tableaux précieux, sa bibliothèque était remarquable ; longtemps une société intelligente et choisie se réunit autour de lui. Depuis quelques années la mort qui avait frappé les La Poype, les Grégoii, les Pollct, les Dessaix avait attristé sa vieillesse et diminué, dans les plus modestes proportions, les intimes qui se groupaient à son foyer. Ses derniers moments ont été encouragés et soutenus par l'énergique dévouement et la tendresse de la compagne de sa vie. Le 27 mai il s'est éteint comme un juste et quand, deux jours après, ses amis l'ont accom- pagné à sa dernière demeure, il n'y avait qu'une voix pour rappeler ce zèle ardent qui aurait voulu guérir toutes les souffrances, cette charité géné- reuse qui prodiguait argent et remèdes a toutes les misères, et pour louer enfin la. noblesse du caractère et la bonté du cœur de celui dont la longue existence a toujours honoré l'humanité. A. V. (1) 11 logeait à cette époque dans le clocher de Fourvièrcs, alors bien national.