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232 OBSÈQUES DU DOCTEUR ROUGIER. premières études et à sa chère profession ; ce patriotique épisode de sa vie servit seulemeut a prouver combien cette généreuse nature savait suffire à tous les genres de courage. Il appartient a d'autres de raconter les diverses phases de cette carrière consacrée tout entière a l'humanité et à la science ; de suivre tout un demi-siècle de profonds et fé- conds travaux ; de rappeler ses inspirations , ses écrits, ses succès. Une bouche plus expérimentée que la mienne vous redira surtout comment les affections nerveuses , ce fléau dominant de nos temps agités, reçurent de Rougier un mode spécial de traitement qui a mérité de passer dans le domaine de la pratique et de populariser son nom. Mais si le jugement des procédés et des progrès,de l'art est le privilège des habiles , chacun de nous a pu voir à l'œuvre cette ardeur pour le bien si active et si réglée , ce tact sûr et pénétrant, également éloigné de l'esprit de sys- tème et de l'esprit d'aventure, cette sagesse pratique qui garde les traditions sans s'y restreindre et expérimente les découvertes sans s'y livrer ; surtout cette haute dignité mé- dicale, glorieux et nécessaire apanage d'une profession qui est à la fois une science, une magistrature et un socerdoce. Cette dignité s'alliait en lui avec la simplicité des mœurs et la grâce des manières ; caractère ferme et serein, cœur chaud et généreux, esprit fin et sincère, susceptibilité déli- cate qui ne voulait pas être blessée parce qu'elle ne blessa jamais, amitié attrayante et fidèle, services et désintéresse- ment de tous les jours : telle fut sa vie. On l'a vu , dans ces temps de mouvements sans relâche et de désirs sans irein, fier de son sort paisible, satisfait d'un modeste patrimoine, concentrant son bonheur dans les douceurs de la considération publique et les joies de la fa- mille, écrivant pour la science et souriant a ses petits en- fants ; vénérable type du vrai sage qui fait le bien pour le