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MACAULAY. SOS avec intelligence l'harmonie des scènes et des personnages, et surtout à se passionner pour tout ce qui passionnait la généra- tion qu'il étudie. Ne croyez pas que des questions autrefois débat- tues et qui nous semblent aujourd'hui, presque étrangères, ne puissent être réveillées de manière à ranimer la passion eile- même et à la rendre tout ausai vive. Combien Macaulay nous en donne-t-il d'exemples? Ne passionne-t-il pas le lecteur français et catholique pour les discussions intérieures de l'Eglise angli- cane du XVIIe siècle, cette Eglise d'un caractère si anglais qu'elle nous est particulièrement étrangère ? Eh bien ! il y a dans les idées, dans la politique de ces docteurs et de ces théo- logiens, dans leur ténacité ou leur complaisance, il y a dans les questions même qui les divisent, quelque chose de bien moins exclusif que nous ne croirions d'abord. Il faut seulement qu'on nous le montre, et c'est là le talent du peintre qui a su reproduire ce mélange de finesse dans les traits, de gravité et de subtilité érudite qui caractérise ses personnages. Peut-être y a-t-il là aussi l'abus et l'illusion du talent. L'es- prit et l'imagination de l'auteur risquent par moment de donner aux choses plus d'importance et surtout d'éclat qu'elles n'en ont en réalité. Il voit ses tableaux et il nous les montre à travers un prisme qui les place sous un jour particulier , quelquefois sous un jour grossissant. En prenant parti pour tel ou tel per- sonnage avec une chaleur un peu rétrospective , il aggrave le risque qu'il court d'altérer la vérité. Ici nous nous trouvons en présence d'une théorie, et d'une théorie remarquable de Macaulay. L'historien, suivant lui, doit être partial ; car^s'il ne prend point de parti dans une querelle, quel intérêt y prendra-t-il? celui d'un juge, cela ne suffit pas ; il faut qu'il y prenne aussi l'intérêt des avocats, et qu'il plaide dans les deux sens, bien que de manière à assurer le triomphe de.l'opinion qu'il préfère, afin de motiver ainsi son jugement. Autrement, comment entraînera-t-il son lecteur? N'est-ce pas là d'ailleurs le procédé de tous les grands historiens ? Sont-ils toujours impartiaux ? Tacite est-il toujours impartial? Faut-il citer ces duels oratoires qui forment quel- ques-unes des plus belles pages deshistoires de l'antiquité? Quand