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480                      ÉLOGE HISTORIQUE

 il est juste que nous payions a ses œuvres d'intelligence le
tribut d'admiration qu'elles méritent, et que nous nous
préparions aussi par l'étude a remplir dignement noire rôle
d'initiateur. M. Servan de Sugny a compris des premiers que
l'heure était venue de populariser les résultats que l'orienta-
lisme européen a produits. Reprenant les travaux d'érudition
qu'il avait déjà ébauchés, lors de sa première jeunesse, à la
faveur de quelques relations avec le personnel diplomatique
ottoman, pendant son séjour a Paris, vers 1825, il publia un
spécimen, sous le titre d'Eludé orientale, comprenant trois
odes de Hafiz et une élégie de Saadi, poètes persans, tra-
duites en vers français avec le texte et la traduction inter-
linéaire en prose. 11 était impossible de mettre avec plus
de loyauté les éléments de la question sous les yeux du
lecteur, en même temps que de montrer tout ce que l'ori-
ginal gagnait de fini et d'élégance , sous la main d'un
traducteur chez qui l'arabisant n'avait pas étouffé le poêle.
Ecoutez encore une fois les plaintes mélancoliques du
vieillard de Chiraz, et dites si l'importation n'est pas
heureuse, même chez les héritiers de la littérature qui avait
produit Horace.
            Sans nous, hélas ! croîtra la rose,
            Sans nous le printemps renaîtra ;
            Notre paupière sera close,
            Que le gazon reverdira.

            Juillet embrasera le monde,
            Décembre obscurcira les cieux,
            Mai rendra la terre féconde,
            Que nous aurons quitté ces lieux !

            Les jardins fleuriront encore,
            En troupe y viendront les amis
            Boire à l'ombre du sycomore,
            Et nous, nous serons endormis.