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 210                ESSAI SUR QUELQUES CHIFFRES

  signale le danger du faible commerce que Rome faisait alors
  avec les Indes. « C'est une chose digne de remarque, dit-il,
  « qu'il n'y ait pas d'année où l'Inde ne ravisse a l'empire
  « romain 50 millions de sesterces (10 millions de francs),
  « et ne nous livre en échange des marchandises qui, chez
  « nous, se vendent cent fois cette somme. » Ce commerce
 que Pline regardait alors comme une cause d'épuisement
 pour Rome (exhauricnte Indiâ) alla toujours croissant. Après
 la chute de l'empire et dans le moyen âge, il se continua par
 l'intermédiaire des Pisans, des Vénitiens et des Génois. La
 découverte du cap de Bonne-Espèranee lui imprima un mou-
 vement encore plus rapide. Les prévisions de Pline s'étaient
 accomplies depuis longtemps, et, au XVIII0 siècle, Montes-
 quieu (32) s'exprimait ainsi :
     « Les Indes ont été, les Indes seront ce qu'elles sont à
 « présent et dans tous les temps. Ceux qui négocieront
 « aux Indes y porteront de l'argent et n'en rapporteront
 « pas. »
    C'est qu'en effet l'argent était le seul objet que l'occident
 pouvait donner en échange a l'orient.
    Les travaux des mines ayant été négligés pendant le moyen
 âge et les causes d'épuisement subsistant toujours, les mé-
taux précieux devinrent plus rares que jamais. La décou-
verte de l'Amérique vint fort à propos pour combler le vide-
 énorrne qui s'était produit dans la circulation. L'importation
eut beau suivre une progression ascendante, l'exportation
la suivit d'assez près. Aujourd'hui, c'est par centaines de
millions que l'argent émigré dans l'extrême orient pour
l'achat des soies comme matière première. Ce qu'il y a de
plus fâcheux, c'est que le seul métal accepté est l'argent,
tandis que l'or est refusé, ce qui ne peut manquer de rom-

  (32) Esprit des Lois, XXI, c. 1