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510           UNE VISITE AU TOMBEAU DE JACQUARD.
       Ourdir sur la bruyère une cellule blonde ,
      La danse du cocon dans la bassine ronde ,
       La fileuse qui chante et détache le brin ;
       Puis , tous les fils tordus à l'aide du moulin,
       L'usine blanche et vaste, e t , sur les étagères ,
       Les éclairs tournoyants des bobines légères ;
       Et, mieux que ne sauraient le retracer mes vers,
       Il peint la soie errante en ses états divers,
       Passant, pour revêtir mille teintes brillantes ,
      De l'azur froid du Rhône en des cuves bouillantes ;
      Il n'eut garde surtout d'oublier vos travaux,
      Vous qui,peintres sans gloire et pourtant sans rivaux;
      Déroulez sur les plis de l'étoffe nouvelle
       L'inépuisable éclat de la Flore éternelle ,
      Ni ceux qui, de votre œuvre analysant les tons,
      Tracent l'ordre des fils et percent les cartons ;
      Ni l'ouvrière assise auprès de la fenêtre
      Où le bleu liseron tend son rideau champêtre ,
      Ni les métiers qui vont, loin de nous emmenés ,
      Tisser la soie aux champs près des lis étonnés ;
      Puis , remontant le cours des époques antiques ,
      Il dit quels échevins fondèrent nos fabriques ,
      Les chapes,les draps d'or, chefs-d'œuvre d'autrefois,
      Les suaires gardés dans le tombeau des rois ;
      Puis l'Orient vaincu, l'essor de notre ville,
      Chaque siècle marqué par un progrès utile ,
      Tous ceux dont la science a secondé notre art ;
      Et d'un geste montrant le métier de Jacquard :



      0 Poètes ! venez lui rendre témoignage ;
      Amants passionnés du rêve et de l'image,
      L'Utile vous déplaît, le Réel vous aigrit,
      Et vos yeux sont tournés où la forme fleurit.
      Pour vous Dieu,c'est un peintre,un poète,un artiste,
      Teignant les horizons de pourpre et d'améthyste ,