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320 l'ÉLOPONÈSË. supérieure à celles des contrées que j'avais parcourues jusqu'à présent. En effet, plus on s'avance dans l'intérieur, plus on re- trouve les caractères primitifs, les traits originaux du peuple ancien. Les races s'épurent en s'éloignant des côtes. Les habi- tants de celles-ci vont et viennent sans cesse.- ils sont agités par une foule de passions et d'intérêts divers ; enfin, leur sang s'est dégradé plus vite en se croisant avec des sangs étrangers. Nous parlâmes longtemps de l'état actuel de la nation grecque, de son progrès qui commence et qui grandira dans l'avenir, enfin de choses relatives à la localité. Le pays était alors agité par l'arrivée du moine Christophore. Ce moine ignare et fanatique parcourait depuis quelque temps la Grèce en prêchant le jeûne et l'abstinence, et semant d'abord à demi-voix, ouvertement plus tard , des doctrines subversives du dogme et fatales à l'autorité du roi. J'en avais déjà plusieurs fois entendu parler sur mon passage comme d'un apôtre inspiré ; personne ne soupçonnait encore qu'il était l'instrument caché d'une faction avide de désordres, et je ne m'attendais pas à la conduite criminelle qu'il tint plus tard, et qui faillit compromettre le repos du royaume. Il savait déguiser sa pensée sous des paroles ambiguës et des dehors austères. Son extérieur macéré, son regard perçant, ses discours fanatiques, le faisaient écouter avec attention. Il prêchait en plein vent, sur le sommet des rochers, sous les grands arbres, et le peuple accourait avec curiosité autour de lui. Il se disait envoyé du ciel pour réformer les abus dont se souillait la terre ; ensuite, croyant son ascendant suffisamment établi, il se fît passer pour une seconde incarnation du Christ lui-même, et, défiant avec audace le pouvoir qui commençait à s'inquiéter, il annonçait que, dans le cas où il serait poursuivi, Dieu renouvellerait en sa faveur les miracles opérés jadis en faveur des apôtres. Les populations impressionnables des montagnes se laissèrent faci- lement abuser par ces absurdes mensonges, et de zélés partisans se groupèrent autour de lui. Les Maïnottes surtout le reçurent avec transport ; il se trouvait au milieu d'eux à l'époque où j'arrivais à Sparte. Ces derniers sont voisins de Sparte et s'éten-