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                     ÉTUDE SUR BLA1SE PASCAL.                        277
 ne songèrent point à s'éclairer, mais à se défendre. Leurs écrits
 cependant, quoique l'Å“uvre des Arnaud et des Nicole, ne tran-
 chèrent point la question, la science et la profondeur étaient
 inutiles -, il rie s'agissait point d'instruire et de convaincre les
 théologiens dont l'opinion était faite, et qui s'étaient partagés. II
 s'agissait d'entraîner le public, de provoquer un mouvement des
 esprits en sa faveur, d'effrayer l'autorité civile qui menaçait et
 de seconder les bonnes dispositions de l'autorité ecclésiastique
 qui ne voulait point condamner. L'opinion publique ne s'était
 point prononcée ; elle hésitait encore entre la renommée de
 Port-Royal, et la puissance des Jésuites soutenus par le roi ; le
 moment était décisif.
    Il fallait débarrasser la question de son attirail scientifique,
 de manière que tout le monde la comprît ou crût la comprendre,
la traiter avec esprit et chaleur pour plaire et intéresser. Les
lecteurs flattés de voir un débat théologique soumis à leur tri-
bunal, inclineraient dans le sens de ceux qui l'y auraient porté ;
peu capables de juger la difficulté par.eux-mêmes, ils la ver-
raient comme on la leur aurait présentée, pencheraient naturel-
lement du côté de ceux qui les auraient charmés et remués, et,
une fois leur direction prise, il serait difficile de les rejeter du côté
opposé. Cette tâche exigeait un homme assez métaphysicien
pour discuter la question, et en même temps doué d'esprit et
d'éloquence ; Pascal était doué de toutes les qualités nécessaires,
aussi ses amis jetèrent-ils les yeux sur lui et le pressèrent-ils
vivement de prendre la plume.
   Indigné déjà de voir attaquer des doctrines et des hommes
qui lui étaient chers, heureux de les pouvoir défendre, désireux
peut-être d'exercer de l'influence et d'essayer sa puissance,
Pascal céda à leurs sollicitations et fit les Provinciales. Il ne
lui vint pas à l'esprit que des théologiens si savants et si pieux
pussent avoir tort et que la doctrine de ses maîtres pût être
fausse; et il remplissait encore une dernière condition non
moins nécessaire que les autres pour réussir ; il était de bonne
foi. Arnaud et Nicole lui fournirent la pensée du livre, les ar-
guments et les citations ; Pascal fournit ce qui en devait faire