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8 POÉSIE. /
L'ardente émotion qui me gonflait le sein !
Mais quoi! je n'ai trouvé qu'un silence stupide,
Je voyais devant moi courir l'heure rapide,
Et je balbutiais comme un enfant troublé
Un mot vide et banal à des sanglots mêlé.
J'aurais gagné son cœur! A cette heure peut-être,
Dans les rayons du soir, assise à sa fenêtre,
Et regardant le lac bleuir à l'horizon,
Ella entendrait le vent lui soupirer mon nom !
— Mais que dis-je? à cette heure, éclatante et parée,
Elle s'anime au bal, de flatteurs entourée,
Ou, pensive, le long des peupliers tremblants,
Elle marche, attentive à des propos galants.
0 noirs pressentiments ! ô morne incertitude !
Visions de l'exil et de la solitude !
LA NATURE.
Enfant! qui peut sonder les abîmes du cœur?
Connais-tu ta maîtresse, et par quelle pudeur
Devant toi son âme est fermée?.
N'a-t-elle pas cent fois maudit sa cruauté?
Le nom de l'exilé n'a-t-il jamais flotté
Sur cette bouche bien-aimée ?
Le front déjà couvert d'une chaste rougeur,
Peut-être songe-t-elle à ce cher voyageur
Balloté sur la mer lointaine?
Ses yeux impatients dévorent le chemin,
O jeune homme, par où tu reviendras demain
Traînant ton amoureuse chaîne.
Un sentiment sincère a sa lumière en soi ;
Laisse faire le temps, qui saura mieux que toi
Préparer cette âme rebelle !