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                   ÉTUDE SUR BLAISE PASCAL.                     375
par la faiblesse de leurs réponses leur commune impuissance ;
le mener enfin au judaïsme , et de là au christianisme qui lui
apprendraient sa destinée véritable.
   Pascal avait compris que, si l'exposition de ce que l'Eglise
enseigne suffit aux chrétiens qui ne doutent point de la foi de
leurs pères, elle ne suffit point aux autres. 11 voulait donner
pour introduction à la vérité divine le tableau désolant et com-
plet des erreurs, des faiblesses, des contradictions, des incerti-
tudes de la raison, afin qu'effrayée de l'image qu'il lui présen-
tait , et de se voir enveloppée de ténèbres, et, flottante sur les
abîmes, elle abandonnât cette indépendance funeste, cette liberté
d'être trompée et misérable, et se laissât conduire aux pieds du
Christ. Ce plan était immense, puisqu'il embrassait, outre la
révélation entière avec ses dogmes, ses préceptes, ses miracles,
son histoire, toutes les difficultés de la métaphysique et de la
morale, toutes les sectes religieuses ou philosophiques qui ont
essayé de les expliquer. H n'a point été rempli, il est vrai, et,
sans les indications des amis de Pascal, nous ne le retrouverions
point dans ces fragments incohérents, mais l'avoir seulement
conçu est déjà la marque d'un esprit supérieur.
   Chacun de ces fragments est d'ailleurs remarquable ; partout
des idées nouvelles, ou du moins des jours, des développements
nouveaux ; souvent un alinéa, une simple phrase contient la
pensée de tout un livre. La partie religieuse n'est pas la moins
riche, malgré les difficultés dont elle était hérissée. 11 n'est
point permis d'inventer en matière de dogmes ; dans l'explica-
tion des mystères l'originalité touche à l'hérésie, et quant aux
preuves du christianisme et à son histoire, après quinze siècles
de commentaires la matière semblait épuisée Pascal sut pour-
tant la renouveler; tantôt s'appropriant les Pères, tantôt les
reproduisant sans les avoir lus, et rencontrant leurs réflexions
par la puissance du génie , tantôt créant tout à fait. Je citerai
les trois caractères du peuple juif rendus d'une manière frap-
pante : l'isolement, la durée, la persévérance dans sa foi ; les re-
marques sur le style de l'Evangile trop simple pour être d'un
homme que les choses divines doivent étonner, tandis qu'un