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338 VICTOR DE LAPRADE. mes, et par là , l'idée catholique se trouve amoindrie. En bas, j'entends l'impie qui chante le triomphe des appétits ; en haut, le juste qui célèbre plutôt sa propre victoire que celle du Christ ; rien ne les rapproche. Mais si le juste, inter- rompant son panégyrique, s'était penché sur le monde, s'il avait tendu le bras au pécheur, si le poète m'eût laissé en- trevoir cette échelle de Jacob qui va de la terre au ciel, comme la scène se serait agrandie ! quelle perspective ! quels éclairs d'espérance et d'amour auraient traversé ces poèmes désolés ! aussi, comme je comprends ce dernier cri du poêle, en finissant son livre : Dis maintenant, jioèle, aux fruits de ton étude l.'adieu delà tristesse et de la lassitude. • La tristesse et la lassitude ! oui, ce sont bien lu les deux sentiments qui ressortenl de la lecture de ces pages. Surpre- nante contradiction ! le poète s'élance vers le Calvaire, il em- brasse la croix, et il ne rapporte de son pèlerinage qu'une plus grande faiblesse, un plus grand découragement. Mais ces défaillances, passagères comme une crise, auront leur terme; il est temps que M. de Laprade, tout en restant catholique fervent, s'adresse à d'autres sentiments. Aux dmes fléchissantes, aux nations vieillies, il faut prêcher le courage, l'énergie, le stoïcisme même, non ce stoïcisme d'apparat, impassible, tout négatif, parce qu'il était païen, mais un stoïcisme actif, plein d'espérance, parce qu'il est chrétien. M. de Laprade doit s'en souvenir : autrefois , dans ses heures de plus grande lassitude , au moment où il enviait le repos sacré du chêne qui obéit sans penser à des forces divi- nes, il ne tardait pas à réagir contre cette énervante contem- plation. * l.ève-toi, Dieu maudit les races accroupies, Des stagnantes cité respirant l'air mauvais ; Le doute et Je repos aujourd'hui sont impies,