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                       VICTOR DE LAPHADE.                     329

 dans quel ordre d'idées et de sentiments M. de Laprade puise
 à chaque instant ; voilà d'où il tire son originalitéeises effets.
 On pourra citer des vers de Lamartine et de Victor Hugo ,
 quelques passages de Bernardin de Si-Pierre, de Chateau-
 briand, où la nature n'est plus considérée seulement comme
 un décors inanimé, mais comme quelque chose qui vit et qui
 est en rapport constant avec l'homme ; toutefois ce qui
 chez eux est une affaire de sentiment actuel et passager semble
plutôt chez M. de Laprade le résultat d'une croyance, d'une
conviction raisonnée. Là git la différence ; l'auteur des Odes
et Poèmes a pour ainsi dire systématisé ce sentiment. Delà,
dans ses descriptions, l'amour des grandes lignes, une ampleur
surprenante , l'emploi des couleurs générales, des rayons
et des murmures à profusion. Il peint par masse, néglige le
détail, ce qui à la longue engendre un peu d'uniformité. Ses
paysages semblent baigner dans la brume lumineuse qui
s'exhale de ce monde saturé d'infini. Sur celte pente, la nature
devient une religion. Aussi qui ne serait frappé de l'impres-
sion vraiment religieuse dont sa poésie est empreinte, môme
lorsqu'il ne veut être que descriptif. Dans les vers cités plus
haut, le poète se compare à unfllsdes Druides; il y a en effet
je ne dirai pas du Druide, mais du prêtre, du Brahmane en
lui.
          Paroles qui flottez de l'âme à la nature,
          Echanges de l'amour qui donne et qui reçoit,
          Part de l'être accordée à chaque créature ,
          Forces 4u Dieu caché que le co»ur aperçoit ;

          Affluez, affluez autour de celle cime,
          D'un nuage vivant que j'y sois revêtu,
          Unissez-vous à moi dans un mélange intime ;
          Vertus du monde entier devenez ma verlu.

  J'ai parlé de Brahmane : à qui en effet comparer Hermia ,
cette fantastique création de notre poète ?Ne la dirait-on pas