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                      VtCTOH DU LAPRADE.                      325
avec le pinceau de Wateau, et trouvaient que pour le moment
tout le progrès possible consistait à romantiser Berlin et
Dorai, M. de Laprade spontanément, modestement, loin des
influences et des excitations parisiennes, essayait d'introduire
quelques éléments nouveaux dans notre poésie menacée d'é-
 puisement.
    Il comprit de suite qu'il n'y avait rien de neuf à tenter dans
l'ordre de la forme pure. S'obstiner à chercher encore l'ori-
ginalité de ce côté,c'était faire fausse route. La langue poéli-
que de ce siècle est désormais fixée ; et ceux qui s'ingénient
encore à remanier l'idiome, à combinerde nouveaux rhylhmes,
ceux qui dans cette voie veulent encore être inventeurs
après Lamartine et Victor Hugo et tant d'autres, ceux-là se
 trompent d'autant plus lourdement qu'en s'imaginant aller
vers l'avenir , ils ne regardent que le passé. Ce n'est pas la
forme de notre poésie qu'il importe de rajeunir, c'est le fond.
La différence aujourd'hui entre un bon poète et un mauvais
poète n'est pas dans l'habileté plus ou moins grande à savoir
tourner un vers. Le nombre est considérable de ceux qui excel-
lent dans la partie purement technique-; mais petit est le nom-
bre de ceux qui peuvent et même simplement veulent penser.
Aussi , la poésie est-elle chez nous quelque chose qui ne
tient à rien , qui vit en l'air, et le poète un automate qui rend
des sons prévus en face d'objets convenus.
   De son côté , la critique n'est pas moins routinière que la
poésie. Je me souviens très-bien des principaux reproches
qui furent adressés à Psyché au moment de son apparition.
Ils étaient tous tirés du caractère philosophique el symbolique
de cette œuvre , c'est-à-dire , de ce qui constituait précisé-
ment sa nouveauté. La philosophie de l'histoire , les théories
sociales , cette préoccupation de l'ensemble, de la marche et
de l'harmonie des choses humaines, toules'ces considérations
qui tiennent tant déplace dans l'esprit de notre, siècle n'a-