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316 PÉLOPONÈSE. reuses. Çà et là , de grands chênes élèvent leurs troncs séculaires et décharnés ; au sommet seulement, ils portent des branches et des feuilles, sombre chevelure qui atteste que la vie réside encore en eux ; on les admire isolés, jaunis et vibrants comme les colonnes éparses d'un vieux temple; derniers vestiges des forêts sacrées où les mortels interrogeaient la nature ; arbres trop jeunes alors pour que la tempête daignât le3 entraî- ner dans sa fureur, trop vieux aujourd'hui pour que l'homme oublie le respect qu'il leur doit, au point de porter à leur racine une atteinte sacrilège. Par dessus les hauteurs rapprochées de Vourlia, le Taygète surgit et grandit aux yeux à mesure que l'on avance. C'est une des plus imposantes chaînes de montagnes de la Grèce ; une de celles qui réunissent à la fois le plus d'hor- reurs sublimes et de calmes beautés. Ses majestueuses assises, ses quatre sommets courbés autour du cinquième qui les domine tous et qui porte sur son front des neiges pour couronne, les sombres abîmes jetés entre ces montagnes font du Taygète le type éternel du génie de la nation qui grandissait à son om- bre; ses flancs austères et vigoureux ne pouvaient enfanter d'autre peuple que Lacédémone. C'est une loi qui parait géné- rale dans l'univers que l'harmonie s'établisse entre les hommes et les lieux qu'ils habitent ; mais, nulle part comme en Grèce, l'homme n'est fait à la ressemblance de la nature au sein de laquelle il vit. Si l'histoire de cette grande nation venait à dis- paraître, on en retrouverait les pages écrites sur le sol même de chacun des pays qui le composent. Sa poésie et sa religion se laisseraient deviner à son ciel bleu, à ses superbes horizons, à ses golfes profonds et mystérieux ; l'architecture de ses tem- ples, aux formes harmonieuses de ses montagnes, aux lignes pures de leurs arêtes extérieures ; ses victoires et ses champs de bataille, à la configuration de ses vallées et de ses plaines. L'aspect de chacune de ses contrées révèle le nom et le génie du peuple qu'elle a nourri. Vourlia est situé sur une haute colline, de laquelle on aper- çoit sans obstacles la vallée de Sparte tout entière ; splendide «et fertile vallée où les végétations les plus diverses croissent